ENLUMINURE DE FERDINAND PERTUS V Le roi Wamba écrase les mutins dans les Arènes de Nîmes
SIEGE DE NÎMES PAR LES WISIGOTHS.
Dom Vaissette – Histoire Générale du Languedoc, 1730.
(673). Wamba, roi des Wisigoths, se mit alors en état d’aller assiéger Nîmes. La prise de cette ville paraissait d’autant plus difficile, que le duc Paul et les principaux chefs des rebelles qui s’y étaient renfermés, y avaient rassemblé toutes leurs forces. N’ayant plus de ressource les rebelles étaient dans la résolution de se défendre avec l’aide des habitants, un grand nombre de Gaulois et de Français que Paul et les autres conjurés avaient mis dans leurs intérêts et attirés à leur secours. Wamba résolu néanmoins de la forcer à se rendre, fit d’abord un détachement de trente mille hommes d’élite dont il donna le commandement à quatre ducs ou généraux avec ordre d’aller investir et d’en commencer le siège. Il se campa avec le reste de ses troupes à quatre ou cinq mille de Nîmes pour couvrir les assiégeants, et s’opposer aux Français en cas qu’ils voulussent venir au secours de cette ville, ainsi que le bruit en courait.
Le détachement de l’armée du roi ayant marché toute la nuit, arriva devant Nîmes à la pointe du jour le dernier du mois d’août, et commença d’abord par établir ses quartiers.
Les assiégés s’en étant aperçus et voyants que les troupes ennemies n’étaient pas aussi nombreuses qu’ils l’avaient cru, résolurent d’abord de sortir de la place et d’aller attaquer les ennemis en rase campagne. Mais craignant d’être surpris dans quelque embuscade, ils n’osèrent s’y hasarder. Et comptant d’ailleurs de recevoir de la part des Français un secours capable de faire lever le siège, ils se contentèrent de se tenir sur la défensive, et de combattre de dessus les remparts. Les assiégeants se disposent de leur côté à l’attaque. Les trompettes ayant sonné la charge des le lever du soleil, ils s’avancent en bon ordre, et s’animant par des cris réitérés, ils font une décharge d’une prodigieuse quantité de pierre, de dards et de flèches pour écarter les assiégés des murailles et les débusquer de leurs postes.
Ceux-ci se défendent avec beaucoup de vigueur, font pleuvoir sur les ennemis une grêle de toutes sortes de dards et les obligent à reculer. Les troupes du roi reviennent à la charge et recommencent l’attaque avec une nouvelle fureur. Mais elle sont vivement repoussées.
On combattit ainsi avec un égal acharnement de part et d’autre jusqu'à la nuit qui mis fin au combat, sans qu’aucun des deux parties put s’attribuer la victoire.
Les assiégeants ayant remarqué pendant l’action qu’ils n’étaient pas en assez grand nombre pour attaquer la place et faire front en même temps aux secours que les assiégés attendaient à tout moment envoyèrent aussitôt demander au roi un nouveau renfort. Ce prince fit marcher sur le champ dix mille hommes de ses meilleures troupes sous la conduite du duc Wandemire, qui après avoir marché toute la nuit, arriva avant le jour au camp devant Nîmes le premier septembre de l’an 673.
Les assiégés qui s’en aperçurent bientôt, en furent alarmés. Le duc Paul voyant arriver ces troupes du haut d’une guérite, commença aussi de son côté à perdre courage, persuadé que Wamba était venu en personne avec toute son armée. Il tâcha cependant de ranimer ses soldats et leur parla ainsi au rapport de l’historien contemporain qui nous à laissé le récit de cette guerre.
« Je reconnais, leur dit-il, à la manière dont l’armée ennemie est rangée, que c’est mon concurrent qui l’a ainsi disposé. Il n’y a que lui qui puisse l’avoir mise dans cet ordre de bataille. Ne vous découragez pas néanmoins, ce sont là toutes les forces de ce Goths orgueilleux, qui se vantait avec tant de témérité de venir nous accabler. Le roi y est lui-même, n’en doutez point, suivi de toutes ses troupes. Tous vos ennemis sont donc ici, et vous n’avez plus personne à craindre. Il est vrai qu’ils se sont rendus autrefois célèbres par leur valeur, et qu’ils se sont signalés en diverses rencontres, soit en se défendant eux-mêmes, soit en attaquant diverses nations dont-il a été la terreur, mais ils ont perdu toute leur ancienne bravoure par le défaut d’exercice, et qu’ils plus maintenant aucune connaissance de l’art militaire. Ils lâchent le pied au premier choc, et cherchent incontinent à se mettre en lieu de sûreté, parce que leur courage affaibli ne leur permet pas de soutenir l’effort d’un combat. Vous éprouverez la vérité de ce que j’avance, des que vous aurez commencé à vous battre contre eux. »
Les assurances, de Paul n’empêchèrent pas quelques-uns des soldats de lui repenser qu’il se trompait, que le roi était absent, parce qu’il ne marchait jamais sans ses enseignes. Paul répliqua qu’il les avait cachées exprès, pour donner à connaître à ses ennemis qu’il était encore à la tête d’un corps de réserve plus fort que toute l’armée qui était devant Nîmes, afin d’être en état de renforcer les assiégeants. Que c’était là une ruse de sa part pour tâcher de vaincre par la crainte ceux qu’il ne pouvait espérer d’assujettir par la force.
Ce prétendu roi avait à peine achevé sa
harangue, que les assiégeants ayant recommencé l’attaque avec plus de vigueur
que le jour précédent, firent jeter par leurs archers et par leurs frondeurs
une nuée de flèches et de pierres sur les remparts contre les assiégés.
Ceux-ci leur répondirent de leur mieux et se défendirent avec beaucoup de
valeur. Cette action ayant commencé dés la pointe du jour, durait encore à la cinquième heure, c’est à dire à onze heures du matin, lorsque les assiégeants raniment leur courage redoublent leurs efforts, écartent enfin des murailles les ennemis accablés par une multitude de traits qui tuèrent et blessèrent entre autres un grand nombre d’auxiliaires, lesquels avaient marchés au secours des rebelles. Ils s’approchent des portes, y mettent le feu, sapent les murailles, ou y font des ouvertures, entrent dans Nîmes, se font jour à travers les rues l’épée à la main, renversent tout ce qui se présente et remplissent cette ville d’horreur et de carnage. Les assiégés, quoique consternés, s’efforcèrent de se disputer le terrain pied à pied et vendirent chèrement leur vies. Mais enfin forcés de céder au nombre, ils se retirèrent dans les Arènes.
On appelait ainsi alors à Nîmes, de même qu’aujourd’hui l’amphithéâtre de cette ville bâti par les Romains, lequel étant ceint de hautes murailles très épaisses, formait une espèce de citadelle, et en à servi longtemps en effet aux habitants. Quelques uns des rebelles en s’y retirant furent poursuivis et massacrés par les soldats du roi qui s’étaient répandus dans la ville pour piller. Mais plusieurs d’entre ces derniers demeurèrent sur place. Les autres rebelles renfermés dans le château des Arènes ne cessèrent de faire des sorties sur les pillards qui se hasardèrent d’approcher les environs, et ils en tuèrent plusieurs…
Le roi Wamba écrase les mutins dans les Arènes de Nîmes.
Nîmes 2000 ans d’Histoire. Service des relations Publiques de la Mairie de Nîmes, 1981.
(673) Au VIIe siècle, un vaste royaume Wisigoth s’organisa du Languedoc à l’Andalousie, Nîmes et son territoire furent confiés au gouvernement du Duc Paul, cousin du roi Wamba. Loin de la capitale de Tolède, le duc Paul tenta de créer son propre royaume et entraîna les nîmois dans sa rébellion.
Le 26 août 673, le roi Wamba et ses cavaliers surgirent devant les remparts. Le lendemain, il prit la ville et assiégea le château des Arènes. Les vieilles arènes romaines avaient été transformées en château fortifié renfermant le palais du gouverneur Paul, les demeures des principaux officiers de la Milice des Arènes, la chapelle Saint-Pierre... et un puits.
Wamba y fit irruption avec ses troupes le 31 août, amenant la reddition du Duc Paul et des mutins. Sage administrateur, Wamba pardonna aux nîmois et intégra les meilleurs d’entre eux dans la nouvelle Milice des Arènes qui lui resta scrupuleusement fidèle.
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