RABAUT SAINT ETIENNE par Albin Michel, 1876.
Rabaut Saint Etienne
Jean-Paul Rabaud, surnommé Saint-Etienne, naquit à Nîmes le 14 novembre 1743 (1). Il était le fils de Paul Rabaud dont le nom est si célèbre dans l'histoire du Protestantisme français au XVIII° ; frappé dès sa naissance par les lois de proscription qui pesaient sur les protestants, il passa toute sa jeunesse dans des retraites cachées, et termina son éducation en Suisse sous la direction de Court de Gibelin, son premier maître.
(1) Précision donnée par Paul Rabaud, le 30 mars 2007 : Dans le livre d'André Dupont sur le personnage (Labor et Fides à Genève en 1989) on peut lire à la page 11 : né à Nîmes le 14 novembre 1743 avec en note : " Cette date nous est donnée par l'acte de naissance de Rabaut Saint-Etienne : " Le vingt-unième novembre mille sept quarante-trois, j'ai baptisé au nom du Père, du Fils, et du Saint-Esprit, Jean-Paul Rabaut, mon fils, que j'ai eu de mon épouse Magdeleine Gaidan. est né le 14 ème du susdit mois...(Lettres à Antoine Court, II, p.418)
Paul Rabaut, père
Dans l'exercice du ministère évangélique, il marcha sur les traces de son père et se distingua à une époque si troublée par la modération des pensées et des actions.
A la mort du vénérable Bec-de-lièvre , évêque de Nîmes, Rabaud Saint-Etienne se rendit l'interprète des regrets qu'inspira la perte de ce prélat dont la génération qui existait alors avait admiré la modération et la tolérance, et composa son éloge. Prenant en mains la défense de ses co-religionnaires, il forma le projet de faire convertir en droit la tolérance dont ils étaient l'objet et alla à Paris pour solliciter plus activement la concession d'un état civil pour les protestants. Appuyées par le respectable Malesherbes, par des magistrats distingués et surtout par l'opinion publique, ses démarches eurent un plein succès et l’édit de 1788 mit fin à la grande erreur de Louis XIV. C'est en 1784 qu'il publia à Paris le Vieux Cévenol ou anecdotes de la vie d'Ambroise Borely, Ses Lettres à Bailli sur ï'histoire primitive de la Grèce lui donnèrent une place honorable dans le monde littéraire. Le succès de cet ouvrage et ses démarches dans l'intérêt de ses coreligionnaires attirèrent sur lui l'attention publique et le firent choisir par les habitants de sa ville natale comme député du tiers-état aux Etats Généraux. Dans cette assemblée, il fut le champion et le défenseur de l'égalité entre les trois ordres, de la liberté de Conscience, de la liberté de la presse et de l'institution du jury pour les délits de la presse ; nommé président de l'Assemblée nationale en 1790, il organisa le corps de la gendarmerie qui remplaça l'ancienne maréchaussée. Ce fut aussi sur sa proposition que fut proclamée l'unité indivisible de la France
Un décret ayant arrêté que la Constituante ne serait composée que d'homme nouveaux, Rabaut Saint-Etienne ne put pas faire partie de cette assemblée, mais il resta à Paris et s'occupa de la rédaction de son Précis de l’histoire de la Révolution française.
En 1792, il fut nommé membre de la Convention dans le département de l'Aube où il ne connaissait personne et sans qu'il eût sollicité cet honneur qu'il ne désirait pas et qui devait lui être si funeste. Voyant la tournure 'fâcheuse que prenaient les discussions, et le danger que courait la liberté, il fit partie du groupe des Girondins qui auraient voulu arrêter la France sur la voie des changements qui paraissaient inévitables mais pour lesquels ils comprenait que le peuple n'était pas mûr.
Malgré cela, quand sur la proposition de Grégoire l'abolition de la royauté fut, acclamée le 21 septembre 1792 par l'Assemblée toute entière, Rabaut Saint-Etienne suivit l'entraînement général, mais il vota pour la réclusion ; malgré ses efforts, la sentence de mort ayant été prononcée, il ne resta plus à Rabaut Saint-Etienne qu'à voter pour un sursis.
Nommé le 23 janvier 1793 président de l'Assemblée nationale, il fut mis en accusation après les événements du 31 mai et arrêté chez lui le 2 juin, mais il s'évada et se réfugia dans les environs de Versailles Mis hors la loi le 28 juillet, il revint à Paris où il trouva un asile dans une maison du faubourg Poissonnière, chez M. et Madame Payzac, auxquels il avait eu occasion de rendre quelques services. Une malheureuse indiscrétion fit découvrir sa retraite. On prétend que Fabre d'Eglantine, voulant faire pratiquer chez lui une cachette, fit appeler un menuisier qui, pour lui donner une preuve de son adresse en ce genre, lui dit qu'il en avait exécuté, chez M. Payzac, une dont il était bien sûr qu'on ne soupçonnerait pas même l'existence.
Fabre d'Eglantine
Fabre d'Eglantine fit aussitôt connaître le fait et Rabaut Saint-Etienne fut découvert et arrêté ; c'était le 4 décembre. Comme il était hors la loi, et qu'il était, par cela même, condamné, il fut envoyé le lendemain à l’échafaud. Le 6, Mr et Mme Payzac payèrent leur dévouement de la même peine.
Rabaud (1) Saint-Etienne avait alors cinquante ans.
Extrait de Nîmes et ses rues, Albin Michel, 1876, tome 2, page 267-271. . (1) NDLR, Albin Michel écrit Rabaud tantôt avec un un "D", tantôt avec "T". -oOo-
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