Invention des reliques de saint Bausile
en 878
 
 
Gravure extraite de l'Histoire générale de Languedoc, édition 1733 par Dom Devic & Dom Vaissette, volume 2, preuves 1
HISTOIRE DE LA VILLE DE NIMES de Léon Ménard (a)
Livre deuxième.
 
XI - Ursus, vicomte de Nines. Invention des reliques de saint Bausile (Baudile) en cette ville.
(An de J.-Ch. 878.)
 
On vient de voir que Bertrand possédait le vicomté de Nimes. lorsque l'évéque Gilbert forma sa demande sur la restitution de la terre de Bizac. Il paraît que ce vicomte ne garda que peu de temps cette dignité. et que ce fut un seigneur nommé Ursus qui la remplit après lui. Celui-ci l'occupait dès l'an 878 que se fit à Nimes l'invention des reliques de saint Bausile, dont une partie considérable fut transférée en Bourgogne. Le détail de tout ce qui se passa à cette découverte nous a été transmis (1) par un auteur contemporain . d'après le témoignage des prétres qui s'y étaient trouvés. Sa relation est si conforme à toutes les circonstances et à toutes les époques, soit de la chronologie, soit de l'histoire de ce siècle, qu'on ne saurait sans injustice le soupçonner d'infidélité. Voici ce qu'il nous en a conservé de plus intéressant.
 
(1) Preuves, chron, III.
 
Trutgaud, abbé de Saissi-les-bois, au diocèse d'Auxerre, avait fait des réparations considérables à l'église de son monastère, qui était le même que celui que saint Romule avait fondé, aussitôt après qu'il eut été forcé d'abandonner celui de Nimes, pour éviter les fureurs des Sarasins. Comme cette église était sous l'invocation de saint Bausile, Trutgaud conçut le dessein d'y placer quelques-unes des reliques de ce saint martyr. Animé de ce pieux désir, et sachant que ces reliques étaient à Nimes dans leur ancien monastère, il profita de l'occasion que lui fournit le voyage que Bernard II, marquis de Gothie, venait de faire dans le Berri (2), où il était allé prendre possession du comté de Bourges. Celui-ci ayant passé à son retour par la Bourgogne avec son oncle Gozlin, qui fut depuis évêque de Paris, l'abbé Trutgaud accompagné de ses religieux . le pria de leur accorder une partie du corps de saint Bausile leur patron. Bernard le lui promit. Sur quoi Trutgaud députa deux prêtres de sa communauté que le marquis de Gothie amena avec lui.
 
(2) Annal. Bertin, page 254.
 
Ces deux religieux étant arrivés â Narbonne avec Bernard, celui-ci les présenta à Sigebode, archevêque de cette ville, et lui exposa le sujet de leur voyage. Ce prélat les reçut très-bien, et eut beaucoup de joie du motif de leur députation. Il se proposait ayant d'aller même avec eux à Nimes ; mais une indisposition qui lui survint l'en ayant empêché, il nomma Théodard, archidiacre de son église, pour y aller à sa place, et fit présent aux religieux de quelques reliques de saint Paul, premier évêque de Narbonne, et de saint Amand, qui avait aussi rempli le même siège, Bernard y envoya de son côté le prince Ursus, qui ne paraît pas être différent du vicomte de Nimes, pour assister en son nom à la recherche de ces reliques.
 
A leur arrivée en cette ville. le peuple qui avait été informé de leur dessein commença à s'ameuter. et â menacer de tout entreprendre pour empêcher qu'on ne leur enlevât un trésor qui leur était cher ; quelques-uns mêmes se disposèrent à prendre les armes. Mais malgré leurs efforts, et avec le secours et l'appuie du seigneur Ursus, on fit la recherche des reliques. L'évêque Gibert, qui occupait encore le siège de Nimes, assisté de Wifred ou Walafrid, évêque d'Uzès, et de plusieurs autres prélats et abbés, s'étant rendus en solennité à l'église de Saint Bausile le 14 avril de cette année 878, on fouilla partout, et l'on découvrit heureusement les reliques de ce saint sous un des murs, dans un cercueil de plomb, où saint Romule les avait renfermées. La joie fut générale. Les évêques entonnèrent le Te Deum qui fut chanté par des ecclésiastiques qui étaient présents, et qu'on assure avoir été au nombre de cinq cents.
 
L'auteur auteur qui me fournit ce récit rapporte qu'on eut à peine ouvert le fournit le cercueil, qu'il en sortit une odeur délicieuse qui embauma toute l'église. Il remarque de plus que cette année le pays ressentit une miraculeuse protection de Dieu, par les mérites de saint Bausile. L'invention de ces reliques à Nimes fut accompagnée des plus grandes prospérités ; la piété des fidèles se ranima ; l'orage de la part des Sarasins, dont cette contrée nétait menacée se dissipa ; la fertilité des campagnes fut plus grande qu'elle n'avait jamais été, et les habitants du pays éprouvèrent les effets les plus signalés de la clémence et la bonté de Bernard, marquis de Gothie (b).
 
(a) Léon MENARD (né à Tarascon le 1er octobre 1706, mort à Paris le 1er octobre 1767) fut conseiller au Présidial de Nîmes. Il se passionna pour l'histoire et l'archéologie.
(b) Bernard de Gothie (844-879), fils de Bernard, comte de Poitiers, et de Bilchilde.
 
 
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