Bourg St Andéol

Extrait de l'Album du Vivarais, Albert Dubois, 1842.

 

 

Route de Viviers au Bourg-Saint-Andéol.

Saint-Montant.

Bourg-Saint-Andéol.

 

En s'éloignant de Viviers, on aperçoit sur la gauche, dans le flanc d'une colline rocailleuse, une grotte qui s'appelle encore aujourd'hui (1) grotte de Saint-Victor. Il paraît que ce saint martyr venait de célébrer dans cette grotte le sacrifice de la messe, quand une troupe de païens vinrent le découvrir dans sa retraite et le massacrèrent sans pitié.

 

Le rétro-aspect de Viviers, vu de cette route, a quelque chose de saisissant; c'est un tableau pittoresque encadré dans des rochers arides. Cette tour mauresque du clocher, cette charpente gothique de la cathédrale, se groupent admirablement au-dessus des maisons de la ville étagées en amphithéâtre.

 

A une lieue de Viviers, on traverse la commune de Saint--Montant. Saint-Montant fut, au temps des guerres de religion, une place forte qui eut l'honneur d'être assiégée, en 1570, par l'amiral de Coligny: il est vrai que l'illustre amiral s'en rendit maître assez facilement.

Les environs du Bourg-Saint-Andéol sont d'une fertilité magnifique. La ville a deux parties distinctes : l'ancienne, qui est dans le haut et dont les rues sont mal percées, quoiqu'il y ait des maisons bien bâties; et la nouvelle, qui se compose d'un joli quai aboutissant à un pont en fils de fer d'une architecture élégante.

 

S’il tant en croire de vieilles chroniques remises en lumière parles doctes travaux de l'abbé Barracan, ce lieu aurait été le Préneste ou le Tibur de l'ancienne Helvétie. Les sénateurs gallo-romains avaient couvert de leurs villas cette colline riante, assise voluptueusement sur les bords de la Tourne, aux rayons d'un brillant soleil.

 

(1) Voir ci-dessus, page 197.

 

Pour choisir leur séjour dans des lieux à la fois agréables et salubres, les Lucullus de la Gaule avaient un merveilleux instinct et un goût éclairé. Les Eucherius, les Justus, les Aulus, les Mannus et plusieurs autres riches colons du Vivarium, avaient décoré ce site de leurs magnifiques demeures. Mannus y importa le culte de ces divinités orientales au moyen desquelles on cherchait à infuser un sang nouveau au paganisme décrépit, et il grava sur les rochers de la fontaine de Tourne l'idole et les attributs mystérieux de la déesse Mithra.

 

Saint-Andéol, qui était venu prêcher en Vivarais aux environs de cette colline, souffrit le martyre à Gentibus, qui en était comme le faubourg: R Gentibus, dit M. Barracan, était situé sur la rive gauche de la branche orientale du Rhône, vis-à-vis la colline appelée Insula Martis. » S'il faut en croire l'antique légende, le corps de l'apôtre fut ensuite poussé par le courant sur le rivage de la colonie du Bourg ou de Berg-Oïati (1), là, il fut recueilli par une vierge de l'une des premières familles du Vivarais, Anycia ou Amycia Eucheria Tullia, fille du sénateur Eucherius Valerianits (2), dont l'aïeul est si honorablement mentionné dans les Commentaires de César. C'est ainsi que les Pudentienne et les Praxède, après avoir reçu, à Rome, le "rand apôtre des nations, dérobaient pieusement ses reliques quand il était mis à mort comme un vil criminel.

 

Dans les classes élevées de la société, les premières semences de la foi chrétienne ont germé d'abord chez les femmes; leur cœur est Sainte Amycie fit creuser dans le roc un oratoire, où elle déposa les restes de saint Andéol. Lors de l'invasion des Vandales, une autre vierge, Tullie, les transporta sur les bords de la Durance; dans ce lieu, un village a été construit, qui porte encore le nom de Sainte-Tullie.

 

Au huitième siècle, les Maures ravageaient les bords du Rhône, et le Vivarais était sur le point de perdre la foi; alors l'évêque saint Béravin 1er fut averti, par une vision, du lieu où étaient les reliques de saint Andéol, et les rapporta lui-mème à Berg-Oïati, dans le tombeau que sainte Amycie lui avait fait creuser. Depuis cette époque, Berg-Oïati devint le but d'un célèbre pèlerinage, et, au lieu de Berg, qui signifie forêt, fut appelé Burg ou ville; puis on le nomma par la suite Burgus Sancti Andeoli.

 

Au onzième siècle, le saint cardinal Lager, évêque de Viviers, fit construire, en l'honneur de saint Andéol, la vaste et belle église qui y existe encore.

 

L'erreur populaire a longtemps donné le nom de tombeau de saint Andéol à un sarcophage antique, en marbre blanc, qui est placé près de la porte de cette église.

 

(1) Oïati. Le bourg s'appelait Berg-Oïati-Vivarais.

(2) Ce même Eucherius fut depuis évêque de Lyon, et il est inscrit dans nos calendriers sous le nom de saint Eucher. Il ne faut pas confondre Amycia Tullia avec sa mère Amycia Meropoea Galla, qui était elle-même sœur de saint Paulin de Nôle. Toutes les deux sont honorées comme des saintes dans plusieurs diocèses, notamment dans celui de Lyon. Leur fête est le 4 mai.

 

Ce sarcophage, qui est d'un bon style de sculpture, paraît remonter au temps du paganisme romain.

 

Les évêques de Viviers étaient seigneurs du Bourg-Saint-Andéol, et la plupart d'entre eux faisaient dans cette ville leur résidence habituelle; il y avait aussi plusieurs monastères.

 

Pendant les guerres du seizième siècle, le caractère tout ecclésiastique de cette ville sembla la désigner aux fureurs des religionnaires.

 

En 1562, elle fut prise et pillée par le baron des Adrets; mais, à peine ce fougueux chef de partisans avait-il quitté le Bourg-Saint-Andéol, que Saint-Remèze, son lieutenant, y fut surpris et tué par les catholiques. Le sire de Beaudiné, chef protestant du Vivarais, s'empara de nouveau de la ville épiscopale, mais il ne put pas s'y maintenir longtemps.

 

En 1570, l'évêque de Viviers avait confié la défense du Bourg au sieur de Blou, seigneur de Saint-Andéol-de-Berg. M. de Blou n'avait qu'une très petite garnison, cependant, l'amiral de Coligny défila avec son armée, du Pont-Saint-Esprit à Saint-Montant, sans s'amuser à faire le siège de cette bicoque, son arrière-garde était encore au-dessous du bourg, son artillerie et ses bagages arrivaient lentement derrière lui, pendant qu'il était à la tête de ses colonnes, quand tout à coup le sieur de Blou fond, avec quelques soldats d'élite, sur l'escorte du convoi, la met en déroute, s'empare des chariots sur lesquels sont la poudre et les boulets, et les fait conduire dans la place, puis, non content de ce premier succès, il vient chercher les canons, il les saisit également, et les emmène au Bourg-Saint-Andéol. Mais le comte de Montgomery et son frère, à la tête de deux ou trois bataillons, se mettent à la poursuite du capitaine catholique, et l'atteignent près des remparts du Bourg-Saint-Andéol.

 

Là, un sanglant combat s'engage: le courageux de Blou se fait tuer en défendant sa prise, les deux Montgomery sont blessés, mais ils parviennent à ressaisir les pièces de canons et à les ramener à Coligny.

Pendant les guerres de religion, les catholiques se maintinrent mieux au Bourg que dans la ville même de Viviers (1). Le Bourg-Saint-Andéol a toujours eu un caractère religieux fortement prononcé; il conserve encore aujourd'hui quelque chose de sa vieille empreinte. On y compte plusieurs couvents; il y en a un, entre autres, qui est de fondation nouvelle (2).

 

(1) Le maréchal d'Amville, grâce à sa haute position, conserva, après sa destitution du gouvernement du Languedoc, quelques places fortes qu'il fit garder par des officiers dévoués à sa personne. Le Bourg-Saint-Andéol fut de ce nombre; mais il fut repris, en 1577, par le sieur de Luynes, capitaine catholique. (Voir Perussis, p. 197 et suiv.)

(2) Celui de la Présentation. Mlle Rivier, morte il y a peu d'années en odeur de sainteté, en a été la fondatrice.

Au Bourg-Saint-Andéol, le fonds de la société est composé d'anciennes familles, de riches propriétaires qui portent dans le monde des manières distinguées et un esprit qui n'est pas sans culture. Il ne faut pas croire que cette existence de loisirs, cette vie tranquille et un peu morne de nos petites villes de province engendre toujours une sorte de somnolence intellectuelle; on avait fait, sous ce rapport, au Bourg-Saint-Andéol une réputation qu'il ne méritait pas (1), ou tout au moins qu'il ne mérite plus.

L'industrie a fait d'ailleurs quelques progrès dans cette ville, depuis quinze ans, il y a maintenant des filatures de soie, et une marbrerie qui a une grande réputation, non seulement dans le département de l'Ardèche, mais encore dans les départements voisins.

 

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