Les Bénédictins de Notre-Dame de Rochefort
du chanoine Albert Durand
extrait du bulletin du Comité de l'Art Chrétien de Nîmes, T. IX, 1907


Armoiries des Bénédictins de Notre-Dame de Rochefort.

De très bonne heure, la chapelle de Notre-Dame et Sainte-Victoire, dont la tradition attribue la fondation à Charlemagne (798), avait compté parmi les dépendances des Bénédictins de Saint-André et le pape Gélase II, en 1118 et 1119, l'avait recensée parmi les possessions de l'illustre abbaye du Mont Andaon.

Au XVIe siècle, la chapelle fut saccagée par les Calvinistes à plusieurs reprises. Après leur adoption de la réforme de Saint-Maur, les Bénédictins de Villeneuve furent, par sentence du Parlement de Toulouse maintenus dans leurs droits sur la chapelle de Notre-Dame et obligés « de tenir effectivement en icelle nombre suffisant de religieux résidants pour y faire le service divin (31 juillet 1637). »
Ils prirent possession du sanctuaire le Ier octobre suivant (1).
Les Bénédictins durent bientôt songer à restaurer agrandir, embellir la chapelle de Notre-Dame de Grâce, à édifier un modeste monastère pour les religieux. Mignard, d'Avignon, « professeur d'architecture et ingénieur du Roy », fournit les dessins d'un tabernacle, d'un retable et des stalles du chœur (2). On bâtissait encore à la veille de la Révolution. C'est dans la seconde moitié du XVIIIe siècle que, sur les plans, et, devis dressés par Franque et Brun, architectes d'Avignon (1762), on éleva la façade actuelle au midi de l'église. Toute en pierres de taille, de style grec, « elle se compose de douze pilastres couplés de distance en distance, avec un fronton demi circulaire, un piédestal et une statue de la Vierge au centre (3). » Les dépenses, y compris d'autres travaux exécutés à cette époque dans les bâtiments du monastère, montèrent à la somme de 8397 livres

1) Archives départementales du Gard, H. 245.
(2) Archives départementales du Gard, H. 249.
(3) Notre-Dame de Rochefort, par un Père Mariste, Avignon, 1861, in-12, page 260.

Les revenus du couvent étaient assez modiques :
3.085 livres en 1681 ; 3943h en 1682; 3.943 en 1683. Nous les voyons produire 9145 livres en 1745, mais les charges s'élèvent alors à 3443 livres. En 1790, le prieur n'accusera que 2.902 livres 16 sols de recettes et le payement de 2182 livres 1 soI 6 deniers de dépenses. Avec de si faibles ressources, le monastère était souvent obligé d'emprunter pour payer les constructions. En 1660, il avait obtenu de l'archevêque d'Avignon, Mgr de Marinis, l'union du prieuré de Lirac (1).

(1) Archives départementales du Gard, H, 262,

Il jouissait encore de quelques prieurés non-unis : Notre -Dame de Carsan, près de Pont-Saint-Esprit, Notre-Dame des Imbres, aujourd'hui, chapelle de Notre-Dame du Saint-Sépulcre, au terroir de Cavillargues ; Notre-Dame de Laval et Saint-Vincent-des-Salles, son annexe, près d'Alais ; Saint-Etienne d'Espeluche et Saint-Privat de Raynac, au diocèse de Valence ; Saint -Vincent-d'Orpières, au diocèse de Gap.
Les Bénédictins de Rochefort possédaient les Barlatières dans le territoire de cette paroisse et la métairie des Imbres, près de la chapelle du même nom à Cavillargues (1). La montagne sur laquelle s'élevait le sanctuaire leur avait été cédée par Louis de La Baume de Suze, évêque et comte de Viviers, agissant comme oncle paternel et tuteur honoraire de Messire Louis-François de La Baume, comte de Suze et de Rochefort {3 décembre 1652) (2).
Sous la direction des Bénédictins, le pèlerinage de Notre-Dame de Grâce fut très fréquenté. L'impiété du XVIIIe siècle ne semble pas avoir refroidi la dévotion à la Sainte Vierge dans les diocèses d'Avignon, Nîmes, Uzès, Viviers, Orange, etc. Les familles, les congrégations, les confréries de pénitents, les paroisses avec leurs curés et leurs consuls viennent implorer la protection de Marie, lui rendre grâces, pour les bienfaits reçus, chanter ses louanges, dérouler de nombreuses processions en son honneur, accomplir les vœux faits par les particuliers ou par les communautés, orner la chapelle d'ex-voto, l'enrichir de belles étoffes, de perles et de diamants, suspendre soixante-dix lampes d'argent massif autour de la statue vénérée de la Vierge secourable.
Les religieux de Rochefort administrèrent avec désintéressement les dons offerts au sanctuaire ; ils distribuaient de larges aumônes et ont laissé dans la contrée une réputation de générosité (3). Peu nombreux, occupés à desservir la chapelle de Notre-Dame ils purent probablement se soustraire avec plus de facilité au relâchement de leur congrégation. Ils n'étaient que trois en 1790, ils déclarèrent vouloir rester.
Leur dernier prieur Dom Jean-Baptiste Cartier (1783-1791), prêtera le serment constitutionnel, comme pour témoigner que la contagion générale s'était infiltrée dans les asiles les plus sacrés.

(I) Archives départementales du Gard, H, 255-268.
(2) Archives départementales du Gard, H, 249, 251.
(3) Un Père Mariste, Notre-Dame de Rochefort, pages 271, 271, 289 etc.

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En savoir plus sur les Bénédictins de St-Maur
> Les Bénédictins de Notre-Dame de Rochefort par le Chanoine J. - B. Petitalot, 1910



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