- ORIGINE
DE LA PLACE AUX HERBES
- et de
- LA
CATHEDRALE ST CASTOR DE
NÎMES
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- La façade nord de la
cathédrale Sainte-Marie occupait la majeure partie de la rue des Drapiers. Nul n'ignore que l'église
romane achevée de bâtir en 1096 ne faisait que remplacer un édifice religieux
remontant aux premiers siècles du christianisme.
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- Il est bien difficile de
se rendre un compte exact d'un monument qui avait lui-même subi diverses
modifications au cours de la période carolingienne. Quelques chartes très
anciennes et des fouilles sommaires pratiquées à diverses époques nous
permettent d'en retracer cependant les traits essentiels.
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- Et tout d'abord, il est
incontestable que l'église affectait la forme des vieilles basiliques
chrétiennes et qu'elle était surmontée d'une toiture en bois, selon la
coutume qui se transmit jusqu'à l'époque carolingienne.
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- Elle était précédée d'une
cour occidentale s'étendant sur le devant de la place actuelle et formant un
atrium, c'est-à-dire une sorte de cloître entouré de murs et galeries. Nos
vieilles chartes s'expriment ainsi (31
juillet 921)
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- Veniens in atrium Sancte
Marie...
- Veniens ad altario
Sancto-Salvatore qui est in atrium Sancte-Marie...
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- Un document de 1075 nous
fait connaître que devant la porte et par, conséquent dans la cour de
l'atrium, on avait coutume de signer certains actes publics et qu'il s'y
trouvait même un ormeau sous lequel on prêtait serment
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- ante regia Sancta Maria
subtus ulmo.
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- Contre les murs latéraux
de cet atrium se trouvaient un certain nombre de niches à voûte cintrée
renfermant les sarcophages ou tombeaux des morts vénérés.
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- Des fouilles exécutées en
1824 sur la place de la cathédrale et poussées à six mètres de profondeur
eurent pour conséquence la découverte d'une de ces niches où se trouvait
encore en place un grand sarcophage monolithe et anthropomorphe reposant sur
deux supports. Ces derniers n'étaient autres que deux chapiteaux d'époque
romaine ayant appartenu à quelque édifice de la Cité ; le sarcophage lui-même
était taillé dans un fragment de frise antique ornée de griffons. Cet
ensemble, exactement reconstitué, peut encore se voir dans la cour de notre
musée lapidaire.
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- D'après les récits de
Poldo d'Albénas et d'Anne Rulman, le pavage était en mosaïque et comportait
des variétés curieuses de dessina géométriques. J'ai pu relever à la
Bibliothèque Nationale, à Paris, quelques croquis de ces carreaux de marbre
entremêlés de petits cubes aux couleurs variées sur l'âge desquels il serait
peut-être téméraire de se prononcer.
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- Il y avait également un
clocher primitif, mais nous savons qu'il était situé sur la façade
méridionale de la basilique, du côté de la Courtine ou ancienne cour de
l'Evêque, non loin de la synagogue des Juifs et de l'église St-Jean. (1)
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- (1) Cette église, probablement ancien baptistère,
formait avec celles de Ste-Marie et de St-Etienne un curieux groupe primitif
de trois édifices qui, comme le fait observer M. Prou, se retrouve à Paris,
Lyon, Auxerre, Sens, Gap, etc. Deux de ces églises sont presque
invariablement consacrées à St-Etienne et à St-Jean.
- (V. Bull. archéol. du comité des Trav. hist. et scient.
1917,1•• livre pp. LV et LVI).
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- Au cours du XIe siècle,
la nécessité se fit sentir d'agrandir à la fois l'Eglise cathédrale et le
cloître des chanoines. Une charte de 1080 nous fait connaître qu'on
travaillait alors activement à toutes ces constructions. Seize ans après (en 1096) l'Eglise était terminée. Je ne
m'étendrai pas sur son inauguration qui fut faite par le pape Urbain II à
l'occasion du fameux Concile qui devait régler les détails de la première
croisade et dont faisait partie le comte Raymond de Saint-Gilles. Ce dernier
pour témoigner de son zèle religieux, proposa d'épouser la nouvelle église.
II lui concéda l'usage de ses armoiries propres, et ce qui valait beaucoup
mieux, il lui apporta en dot le beau domaine de la Bastide et Font-Couverte
situé sur les bords du Vistre, à 5 ou 6 kilomètres de notre ville.
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- La nouvelle Cathédrale
possédait une immense nef centrale en berceau accompagnée de deux nefs
latérales comprenant un certain nombre de petits autels secondaires ; nous
ignorons la disposition de l'abside que certains auteurs supposent munie d'un
deambulatorium. Les chapiteaux et colonnes qui l'ornaient étaient fort
riches, et presque tous empruntés à des monuments romains ; le pavage
primitif avait peut-être été conservé.
-
- A l'extérieur, un grand
clocher occupait l'angle N. O. ; au sud, la tour Bispaline ou de l'Evêché
occupait presque le milieu de la façade latérale.
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- On note aussi la
présence, au nord et au sud, de deux petites tours carrées, sortes d'énormes
contreforts, creux à l'intérieur, sans ouverture apparente, et destinés
sans-doute à servir d'escaliers autant que de supports, la date de leur
construction me paraît plus récente et pourrait remonter peut-être à l'époque
où l'église fut fortifiée par les comtes de Toulouse ?
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- Dans une importante
charte de donation accordée en 1177 au chapitre cathédral par Bernard-Aton,
vicomte de Nîmes, il est fait mention d'un clocher dit de Sainte-Eulalie dont
j'ai longtemps recherché l'emplacement. Certains documents inédits de nos
Archives nationales m'ont enfin convaincu qu'il s'agissait en réalité du
grand clocher actuel formant angle N. 0. entre la Place et la rue des
Drapiers.
-
- Mais pourquoi ce vocable
de Sainte-Eulalie qui ne peut à 'appliquer à aucune de nos vieilles églises
nîmoises, encore moins à la Cathédrale ?
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- Fallait-il admettre une
distraction du copiste et adopter, par exemple, la leçon Sainte-Eugénie pour
Sainte-Eulalie...
-
- Comme il s'agit en
réalité de plusieurs actes, qui sont tous des originaux, cette hypothèse est
à écarter.
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- La solution est en somme
beaucoup plus simple et consiste dans ce fait que l'Eglise cathédrale
possédait un autel consacré à Sainte-Eulalie (Voir notamment l'inventaire de
1219 dans les preuves de Ménard, tome I) et que cet autel devait se trouver à
la base même du clocher auquel il donna son nom.
-
- Et à ce sujet il me sera
permis de faire observer que ce vieux clocher roman n'était point terminé par
une terrasse crénelée comme on l'a cru jusqu'ici, mais .par une toiture
pyramidale semblable à celles de beaucoup de clochers contemporains. L'acte
de 1177 ne laisse aucun doute à cet égard
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- Ab acua quae est superius
cloquerium Sanctae Eulaliae usque ad viam quae discurrit ad Pratum
-
- Les portes étaient au
moins au nombre de trois : l'une ouvrant au midi, communiquait avec la cour
de l'Evêque et nous n'avons pas à nous en occuper ici ; les deux autres
étaient situées à l'ouest et au nord sur la voie publique.
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- Même avant la
reconstruction de l'Eglise, le grand portail ouest était désigné sous le nom
de Regia, c'est-à-dire la porte royale, la grande entrée. Ce nom fut conservé
par la suite aux deux portes servant de passage au public (1).
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- (1) Le grand portail à deux vantaux devait être peint
en rouge, car un acte de 1149 lui donne le nom de janua rubea.
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- La plus grande des deux,
celle qui ouvrait sur la place publique, prit naturellement celui de grande
régale (regia magna) et c'est
ainsi que nous la trouvons désignée dans un grand nombre de documents de
1486, 1218, 1219,1334, etc. etc. Quant à la porte septentrionale de la rue
des Drapiers, elle reçut par opposition le nom de petite régale, en
languedocien, Petite Rayole.
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- Nos historiens Poldo
d'Albénas, Rulman et Deyron de même que tous les actes officiels la désignent
ainsi et nous font connaître qu'un cimetière était établi sur le devant.
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- A l'époque primitive,
lorsque de grands espaces existaient encore autour de l'Eglise, on enterrait,
non seulement dans la cour de l'atrium, mais encore tout autour du monument
et c'est ce qui explique la présence de tombes wisigothiques dans les rues et
dans certaines maisons voisines de la Basilique.
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- Mais lorsque fut créée la
rue de la Draperie, peu après la construction de la Cathédrale, il fut
interdit d'enterrer ailleurs que dans l'Eglise ou dans les deux cloîtres du
Chapitre. Réserve fut faite cependant du petit espace compris entre les deux
tours du nord, large de 3 à 4 mètres seulement, et long d'une vingtaine de
mètres.
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- Les fouilles faites en
septembre dernier sur cet emplacement restreint ont mis à nu une première
courbe superficielle de 0 m. 75 environ d'épaisseur au sein de laquelle se
trouvaient quelques ossements épars au milieu de restes de cercueils en bois.
Au-dessous, sur une profondeur de 1 m. 50, on trouve de nombreux caissons en
dalles extrêmement resserrés et formant deux couches superposées : les plus
anciens remontent certainement au haut moyen-âge.
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- Le premier document écrit
concernant ce cimetière est un testament d'Aujoza Cheyron (22 mars 1497) laquelle déclare élire
sépulture dans le petit cimetière de N. D. de la seds de Nîmes, à l'intérieur
de son tombeau da famille (1). Il semble résulter de cette dernière
indication que le monument funéraire était adossé au mur de la Cathédrale
comme cela existe dans maintes églises de cette époque.
-
- (l) Archives départementales, E.653.
-
- Cathédrale de Nîmes, après la Michelade de 1567
- .
- On sait qu'à la suite des
troubles de la Michelade (1567), la Cathédrale romane fut presque
complètement ruinée et qu'il ne resta debout que les deux clochers, partie
des façades ouest et nord, et la Petite Rayole.
-
- L'église ne put être
reconstituée qu'après 1610 et certains particuliers profitèrent de cet état
d'abandon pour s'emparer de l'emplacement du petit cimetière et y construire
de petites maisons. Au Cannage de 1596 ces dernières figurent sous les noms
de Babouis (maison natale de Darboux), Granier et Eyroux (maisons où viennent d'être effectuées les fouilles
de septembre).
-
- Dès que le calme revint
dans nos murs le Chapitre réussit à racheter les petites masures en question
aux prix de 250, 1500 et 2000 livres. Il avait alors l'intention de les
démolir en prévision de la réédification du monument. Effectivement, la
cathédrale fut relevée une première fois de 1610 à 1620, mais elle fut remise
à bas au cours des guerres du duc de Rohan, et ce n'est que dans la, période
de 1638 à 1647 qu'on put enfin la rétablir dans son état actuel. (carte
postale ci-dessous)
-
- La
cathédrale en 1911
-
- C'est au cours de toutes
ces vicissitudes que disparut la grande et belle tour de l'Evêché qui passait
pour une merveille architecturale aux yeux de tous les contemporains.
-
- Quant à la Grande Régale
il n'en resta plus que la frise atrocement mutilée et rien ne nous permet
aujourd'hui d'en donner la moindre idée. Un auteur nîmois, Adrien Péladan,
assure qu'un vieux dessin de la Cathédrale était jadis entre les mains de M.
de Bérard, conservateur adjoint de notre Bibliothèque et qu'il représentait
la porte centrale divisée en deux par une colonne médiane. Ce dessin étant
aujourd'hui perdu, il n'est pas possible de se prononcer sur son
authenticité.
-
- Pour ma part, je n'ai pu
retrouver à la Nationale qu'un croquis de Rulman se rapportant à l'église de
1615. Comme il est aisé de s'en rendre compte, les nouveaux constructeurs
n'avaient conservé de l'ancienne porte que la frise décrite par Ménard. Les
deux têtes de taureaux en marbre dont il sera question ci-après, furent
supprimées à cette date.
-
- Je dois ajouter cependant
que notre musée lapidaire possède un précieux document qui n'est autre qu'un
des claveaux formant l'archivolte moulurée du grand portail. Je l'ai
recueilli en 1911 au cours de fouilles effectuées sur le devant de la cathédrale
(1). En comparant ce, profil aux archivoltes de Saint-Gilles et Arles (Voir Révoil, Arch. romane, etc…) on
reste convaincu que ce portail ne le cédait en rien aux précédents comme
dimensions et comme richesse des moulures.
-
- (1) V. mes Recherches du Musée 1911,
-
- Si jamais l'on se décide
à démolir l'horrible porte actuelle et à la remplacer par une autre plus
conforme à la tradition romane, j'estime que le premier travail devra être
d'effectuer quelques fouilles profondes sur le devant du monument pour
essayer de retrouver encore quelques restes ayant pu échapper à la ruine
totale.
-
- Félix
Mazauric, 1916
-
- La
Cathédrale St Castor de Nîmes
- > La
consécration de la Cathédrale
de Nîmes par
Eyssette, 1853
- > Restauration de la Cathédrale
de Nîmes par
Adolphe Pieyre, 1887
- > La Cathédrale par François Durand,
1912 avec tous
les détails sur la frise
- > La place aux herbes, par Félix Mazauric 1916
- > La
Cathédrale Romane de Nîmes par
Gouron, 1930
- >
Article
MIDI LIBRE du 16 octobre 2005.
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