M. le
chanoine Bouisson a la parole pour sa lecture sur la jeunesse studieuse de
Tonance Ferréol. Il commence
par quelques paroles de félicitations aux nouveaux élus de l'Académie. Il dit,
qu'après chacune des séances de réception, l'Académie française consacre quelques
instants aux travaux du Dictionnaire ou de la grammaire. Notre Compagnie est
vouée par les termes de sa fondation, à s'occuper d'autres objets ; l'histoire
locale et les monuments antiques. L'ordre du
jour porte précisément une étude historique qui sera la réponse à cette
question : « Qu'était-ce au juste, que Tonance Ferréol ? » C'est une tâche difficile que de raconter l'enfance et la jeunesse
studieuse de Tonance Ferréol. Les écrivains de son temps négligeaient
communément de nous conserver les détails biographiques. Seuls, les poètes nous
en fournissent un certain nombre. Nous en trouvons encore dans les documents
lapidaires, tels que les bornes les tables de marbre ou de bronze, les
inscriptions religieuses ou les épitaphes. C'est grâce au poème de Sidoine Apollinaire, intitulé : «Panégyrique
de Narbonne», que nous connaissons la naissance de Tonance, dans cette ville,
dans une maison que son illustration devrait nous permettre tôt ou tard
d'identifier, car ce fut la maison de nombreux rois et fils de rois, de
plusieurs empereurs byzantins et de la célèbre Duodah, fille de Charlemagne. Narbonne
possédait une école de grammairiens et de rhéteurs du plus grand renom. La
jeunesse gallo-romaine s'y exerçait à écrire et à parler le latin de la bonne
époque et le grec du siècle de Périclès. Elle puisait, dans ce milieu
distingué, une grande ouverture d'esprit et une connaissance parfaite des
hommes et des choses : « Tonance Ferréol
entreprend la création de ses vastes propriétés territoriales. » Nommé, en 450, préfet du Prétoire des Gaules, Tonance se trouvait, à 35
ans, en possession d'un titre qui faisait de lui presque l'égal des empereurs
et, du moins, leur auxiliaire indispensable, rôle qu'if devait conserver
pendant 36 années, sous l'autorité toujours affaiblie, parfois simplement
nominale des dix derniers empereurs d'Occident. Valentinien
III, qui l'avait appelé à cette fonction, presque suprême, cessa de gouverner
l'empire en 454, un an avant sa mort. La chance voulut que la pression des Celtes, sujets de l'empire, fit monter
sur le trône impérial le Gaulois Avitus, beau-père de Sidoine Apollinaire et
allié par conséquent à la famille des Ferréol. L'aimable écrivain qu'était
Sidoine, publia aussitôt le panégyrique du nouvel empereur, signala
l'enthousiasme avec lequel les Beaucairois fêtèrent cette promotion d'un des
leurs à l'empire. Avitus, retrouvant à Arles l'ami de son gendre, l'engagea à se marier et
voulut lui servir d'intermédiaire pour obtenir que Zénon l'Isaurien, alors
Maître des milices de l'empire d'Orient, lui accordât la main de sa fille,
Papinianille. Le mariage fut célébré à Constantinople et chacun l'efforça de
dissimuler aux yeux de Tonance la tare de la famille de son épouse. En ramenant
Papinianille à Narbonne puis à Arles, Tonance introduisait dans, la maison de
son père une hérétique nestorienne. Plusieurs faits de grande importance trouvent
leur explication dans cette tromperie voulue. A dater de cette année, 454, Arles fut la résidence habituelle du Préfet
des Gaules et de sa famille. Tonance ne crut pas devoir se transférer à Ravenne
où les derniers empereurs s'étaient retirés. Il songeait depuis longtemps à se créer un domaine qui pût lui fournir un
séjour agréable pendant les mois d'été et dans le cas où il aurait besoin de
prendre quelque repos. Il dédaigna d'acquérir quelque villa dans le littoral du
Golfe du Lion que les propriétaires, s'empressaient de vendre afin d'aller
s'établir aux environs de Ravenne. Il estimait qu'on ne peut vivre heureux et à
l'aise que dans une propriété assez vaste pour contenir des plaines de grande
culture, des vallées ombreuses, des prairies au flanc des montagnes, des
pacages naturels et des forêts se prolongeant indéfiniment dans la grande
montagne. Tout compte fait, Tonance décida de fonder son premier latifundium au pied
de la Cévenne Arécomique, sur la rive gauche du Gardon, en amont de la station
d'Alestum où une garde d'esclaves veillait à l'entrée des chars publics dans la
forêt Regordane. Le Chanoine
Bouisson . -oOo-
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