HISTOIRE GENERALE DE LANGUEDOC

Dom Vaissette.

 

Tonance Ferréol préfet des Gaules.

Sa famille originaire de la Narbonnaise première.

Suite à l'invasion des Wisigoths il se réfugie à Trèves

 

L'assistance des évêques de la Narbonnoise premiere aux conciles d'Arles, qui étoit la principale des villes qui restoient alors aux Romains dans les Gaules, prouve, à ce qu'il paroit, que la plupart des villes épiscopales de celte province étoient dans le même tems sous la domination de l'empire, et quelles n'avoienl pas encore passé sous celle des Wisigoths.

Il est certain d'ailleurs que la ville de Narbonne obéissoit dans ce tems-là aux Romains, et nous croions en avoir une preuve pour celle de Nismes dans les lettres du célébre Sidoine Apolinaire. En effet suivant ces lettres Tonante Ferreol préfet des Gaules faisoit alors son séjour ordinaire aux environs de cette derniere ville, et il n’est pas vraisemblable que le premier officier de l'empire dans ces provinces, eût résidé dans un pays soumis aux Wisigoths.

Ce préfet étoit peut être natif de Nismes on sçait du moins que sa famille avoit des biens considerables dans la Narbonnoise première et que quelques-uns de ses descendans étoient originaires de Narbonne. Il étoit par sa mere petit-fils d'Afranius Syagrius préfet du prétoire qui excerça ensuite la charge de consul en 381 et 382 et dont la famille n’étoit pas moins distinguée que celle de Ferreol par la noblesse et par les dignitez. Ce dernier ne dégénera pas de la vertu et de la gloire de ses ancêtres :

Il mérita d'être élevé à la charge de préfet des Gaules qu'il occupa durant trois années consecutives, sçavoir l'année 452 et les deux précedentes. Il s'attira dans l'exercice de cette importante dignité, l’estime, l'affection et les applaudissemens des peuples, par le soin qu'il prit de les soulager et de diminuer les impôts dont ils étoient accablez.

Il témoigna dans la suite son zele pour les intérêts et les droits de son souverain en se portant pour accusateur contre Arvande son successeur dans la préfecture des Gaules, coupable des crimes de péculat et de léze-majesté. Sa moderation, sa prudence, sa politesse et sa douceur qui le faisoient admirer, eurent plus de force pour éloigner Thorismond des portes de la ville d'Arles, que n'en auroit eu Aëce avec toutes ses troupes. Sidoine faisoit un cas particulier de sa pieté ; et c'est par estime autant que par respect qu'il mit dans le recueil de ses épitres une lettre qu'il lui avoit écrite, parmi celles qui étoient adressées aux évêques.

Ferreol faisoit sa demeure ordinaire dans une de ses maisons de campagne appellée Prusian (Prusianus), et située sur les bords du Gardon dans le territoire de Nismes. La description qu'en fait Sidoine son allié, et la maniere agréable avec laquelle il y fut reçu nous font également connoître la beauté de la situation de ce lieu et la politesse de Ferréol, avec celle des peuples de cette partie de la Narbonnoise qui n'étoit pas encore soûmise aux Wisigoths.

Sidoine l'éprouva dans le voiage qu'il fit à Nismes pour y voir cet ancien préfet, et le senateur Apollinaire son parent. L'un et l'autre voulant avoir le plaisir de le loger et de le divertir, le menerent dans leurs maisons de campagne situées aux environs de cette ville.
Chacun l'invita tour à tour durant sept jours ; Ferréol dans sa belle maison de Prusian, et Apollinaire dans celle de Voroangus, où ils tàcherent de l'amuser agréablement, tantôt par les jeux et la bonne chère, tantôt par la promenade et le plaisir du bain, et enfin par la lecture et la conversation; et cela avec tant de politesse et une si grande ouverture de coeur, que Sidoine fut charmé des témoignages de leur amitié et des soins qu'ils se donnèrent pour lui faire goûter tous les plaisirs de la campagne.
Ferréol avoit une autre maison de campagne vers les montagnes des Cevennes appellée Trévidon, où il se relira sur la fin de ses jours et avant l'an 470. On pourroit conjecturer par la maniere dont Sidoine Apollinaire parle de ce lieu, que c'est le même que celui de Trève situé dans les Cévennes et l'ancien diocèse de Nismes sur la frontiere du Roüergue et du Gewaudan entre Mérueys et l'abbaye de Nant, mais il paroit d'un autre côté que ce lieu devoit être situé à la droite du Tarn, ce qui ne convient pas avec la situation de Trêve.

Ferréol s'y retira sans doute pour n'être pas obligé de vivre sous la domination des Wisigoths, après que ces peuples eurent réduit sous leur obéissance la Narbonnoise premiers et avant qu'ils ne se fussent rendus maures de l'Aquitaine première où ce lieu étoit situé.

Papianille, femme d'une rare vertu et de la même famille que l'empereur Avitus, suivit Ferréol son époux dans sa retraite, mais on ignore si leurs enfans s'y retirerent aussi avec eux. Parmi ceux-ci Tonante, dont le même Sidoine parle avec éloge, se distingua beaucoup par son inclination naturelle et son goût exquis pour les lettres. On lui donne pour frere Roricius évêque d'Usez dont nous parlerons ailleurs, aussi bien que de Saint Ferréol évêque de la même ville, et des autres descendans de ce préfet des Gaules, dont la famille se perpetua dans la Narbonnoise. C'est du même Ferreol, qui vivoit encore vers l'an 476 que quelques-uns de nos généalogistes tirent l'origine de la maison roiale de France qui regne aujourd'hui ; mais ce sentiment est combattu par d'autres.

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En savoir plus sur Tonance Ferréol

> Tonance Ferréol par le chanoine Bouisson, 1936

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