L’énigme des Vierges Noires.
(600) L’esprit celtique s’est toujours maintenu en Gaule romaine aussi bien que dans l’empire Carolingien.
Les Celtes se répandirent autrefois dans le monde alors connu, occupant la vallée du Pô (la Gaule cisalpine) et la Galatie dans l’actuelle Turquie. La chaîne des dolmens s’étendant, par le circuit méditerranéen méridional, jusqu’aux Indes, évoque même les émigrations pré celtiques. Le celte Ram ou Rama, venant du nord, probablement des bords de la Baltique, cette autre mer intérieure, apporta dans l’Inde le culte du bélier, emblème de la paix, opposé à celui du taureau, symbole de la violence. La grande migration pré celtique des hordes dirigées par Ram vers le continent asiatique devait provoquer l’apparition de la pensée aryenne et de l’esprit indo-iranien.
Il est à remarquer que l’esprit celtique s’apparenta, sembla-t-il, assez facilement avec l’esprit punique. Pierre Hubac signale que l’on sait peu de choses sur les présences puniques en Gaule, au cours des deux millénaires qui précédèrent les guerres de César, mais quelles ont cependant existé.
La route commerciale allant du Rhône au Pas-de-Calais fut suivie par les Puniques et il semble que les commerçants grecs utilisèrent les chemins de pénétration pacifique ouverts par les Puniques, mais l’on ne retrouve en Gaule, sauf dans le midi tout à fait méditerranéen, que de rares présences grecques, localisées et très superficielles, par contre, sont relevées très aisément des traces puniques. Pierre Hubac nous cite Arles avec sa grotte des fées, allée couverte que décore un signe de Tanit gravé sur la paroi de rocher ; ce sont toutes les cités grandes et petites qui bordent le Rhône, la Saône, l’Allier, la Haute-Loire, l’Yonne, la Marne, la Seine et l’Oise. Des traces du culte à Isis ont été retrouvées à Chartres, à Paris à Provins.
En effet, les Puniques ne firent pas que passer ; ils séjournèrent, s’installèrent. Ils prospectèrent les gisements de minerais du Massif Central ; leurs traces sont retrouvées partout où se trouve une mine, un filon.
D’après Pierre Hubac, la concrétisation matérielle et spirituelle de leur influence est trouvée dans l’existence des « Vierges Noires », partout où furent célébrés le culte de Tanit, la colombe d’Astarté, le culte d’Isis, de Cybèle aux serpents. Au puy se trouvaient des vierges noires à la colombe ou à l’oiseau. Il se trouve des vierges noires dans toute l’Auvergne et même en Bretagne, ces deux régions au particularisme maintenu grâce à l’esprit celtique.
Nota : Un fait troublant qui recoupe le paragraphe précédent, dans un livre écrit en 1847 destiné aux pèlerins de Notre Dame de Rochefort l’Abbé J. A. G. écrit ce qui suit :
« Quoiqu’il en soit, le culte rendu à Marie sur cette Montagne est très ancien. Il date probablement du jour de la consécration de la première chapelle qu’on érigea.
Les religieux Bénédictins, qui eurent le bonheur d’être, pendant près de 200 ans, les gardiens de la sainte Montagne, rapportent que, déjà, depuis plusieurs siècles avant leur arrivée en ce lieu, les peuples des environs y honoraient, dans une petite chapelle, une sainte inconnue, sous le nom, symbolique apparemment, de sainte Brune, dont ils possédaient une figure, en grande vénération parmi eux.
Cette dévotion avait pour fondement une tradition fort ancienne, religieusement transmise de père en fils, et soutenue par les grâces et le soulagement sensible qu’y recevaient les malades, principalement ceux qui étaient affligés de maux de tête. » P.J. André,
La Vierge Noire de Notre-Dame de Rochefort
Nota Webmaster : Le mythe de la vierge noire a été effectivement transmis par la tradition orale, en effet enfant cœur et toujours fourré à Notre-Dame avec mon copain Maurice j’ai souvent entendu parler de la vierge noire, cachée, perdue, retrouvée et détruite. En voici très certainement l’origine.
Bien des pèlerinages ou des lieux de dévotion ont eu pour origine l'invention miraculeuse d'une statue de la Vierge.
Pour la plupart d'entre eux, il s'agit de "Vierges Noires", dites aussi Vierges de Saint-Luc, car une charmante légende veut que ce soit ce saint évangéliste qui ait peint le portrait de Marie d'après nature, ce qui lui a valu d'ailleurs d'être le patron des artistes-peintres après avoir été celui des médecins.
Les inventions miraculeuses sont faites en général par des gens de condition très modeste, tels que bergers, chevriers, humbles paysans, etc... Elles ont souvent pour théâtre des grottes ou des anfractuosités rocheuses situées dans des sites sauvages. C'est le cas, par exemple, de Notre-Dame de Consolation, appelée aussi Notre-Dame la Brune, petite statue en albâtre qui fut trouvée le 16 mai 1647 sur le terroir de Lirac, dans une grotte retirée, surnommée depuis la Sainte-Baume. La découverte peut avoir lieu aussi dans un buisson ou même dans un champ, comme c'est le cas pour Notre-Dame la Brune, à Mazan dans le Comtat, dont la statue fut découverte par des sarcleuses au milieu d'un champ de blé, dans une sorte de niche de verdure formée par les tiges végétales.
Nous allons voir que l'invention de Notre-Dame la Brune de Rochefort s'inscrit, elle aussi, avec quelques variantes, dans le canevas habituel de ces pieuses légendes.
D'après une ancienne tradition, la statue de bois que l'on vénérait dans le sanctuaire depuis Charlemagne, avait été cachée dans une anfractuosité de la montagne à l'époque de l'invasion des Hongrois, qui, après les Normands, avaient dévasté le saint lieu en l'an 925. La madone n'avait jamais été retrouvée, car les religieux qui l'avaient ainsi soustraite à la profanation des Barbares étaient morts sans avoir révélé leur secret.
Le pâtre émerveillé aperçoit tout à coup une statue de la Vierge...
Or voilà qu'un beau jour, un berger faisait paître son troupeau dans une vallée voisine lorsqu'un orage d'une rare violence vient à éclater. La foudre, après avoir sillonné la nue, frappe les flancs escarpés de la colline, faisant voler en éclats des quartiers de rochers qui roulent vers le fond du vallon.
Une cavité assez profonde est mise à découvert et, dans cette sorte de grotte, le pâtre émerveillé aperçoit tout à coup une statue de la Vierge qui se tient là, debout, entourée d'un halo resplendissant. Il court aussitôt annoncer la nouvelle aux habitants des alentours qui arrivent bientôt sur les lieux et constatent qu'il s'agit bien de l'ancienne effigie de Notre-Dame de Rochefort. Après avoir manifesté leur joie, tous ces braves gens ramènent la madone dans son sanctuaire, au milieu des transports de l'allégresse publique. Ceci se passait, dit-on, vers le milieu du XIIe siècle...
En 1575, les Calvinistes prirent Rochefort, après cet d'assaut, l'ancienne église paroissiale et le château de Rochefort n'offraient guère que des ruines ; quant au monastère de Notre-Dame, livré sans défense au vandalisme des Huguenots, il fut renversé de fond en comble. Les religieux prirent la fuite, quelques-uns peut-être furent égorgés. La sainte chapelle demeura fortement endommagée, et si une partie de ses constructions résista aux efforts redoublés des démolisseurs, elle ne le dut sans doute qu'à son extrême solidité.
Et le désastre n'est pas seulement matériel. Les archives précieuses du sanctuaire, les livres de prières, les ornements, les vases sacrés, les images et les reliques saintes, toutes les richesses du saint lieu ont été livrées au pillage ou à l'incendie par les Protestants. Et cet état de désolation va durer environ un demi-siècle.
La colonne de pierre, jadis élevée par saint Guilhem (1) au fond de l'abside, est demeurée debout ; mais l'antique statue de Marie qu'elle supportait, et aux pieds de laquelle tant de générations ont venues se prosterner, a été abattue.
(1) C'est Guillaume qui servit de principal modèle aux auteurs des chansons de gestes du cycle de Guillaume au Court Nez ou Guillaume d'Orange. Il fonda l'abbaye de Gellone, en un lieu qui prit, après sa mort, en souvenir de ce nom et de son séjour le nom de Saint-Guilhem du Désert (département de l’Hérault). Vers le milieu du IXème siècle, dans les premières années du règne de Charles le Chauve, vivait à Uzès une princesse exilée dans cette ville par son mari. C'était Dhuoda, femme de Bernard, comte de Barcelone, duc de Septimanie et fils de Guillaume d'Orange.
Des mains pieuses la recueillirent et la relevèrent ; elle reparut quelque temps sur son trône. Mais on la reconnaissait à peine, tant elle était défigurée par le temps et par les mutilations de l'impiété. On en vint jusqu'à ignorer qui elle représentait, et plusieurs attribuaient à quelque sainte inconnue le nom de Sainte-Brune, porté si longtemps par cette image de Notre-Dame.
Du nombre de ces ignorants fut peut-être l'ermite Grégoire, qui avait fixé sa demeure dans les ruines de l'ancien monastère. Toujours est-il que ce malheureux, voyant là cette grande statue de bois vermoulu, jugea bon de s'en débarrasser en réduisant en cendres l'antique madone. Quelque temps après avoir brûlé la statue, dans les premières années du XVIIe siècle, l'ermite Grégoire abandonna la montagne et ne fut point remplacé.
Et les ruines s'amoncelèrent de plus en plus dans notre infortuné sanctuaire, qui tomba dans un complet délabrement ; au point que les chroniqueurs le représentent comme étant « sans autels ni images ; les murailles ouvertes de toute part, recouvertes d'herbes et de ronces ; le toit tout ruiné et défait, sans portes, ni serrures, ni fenêtres, ni aucun pavé. Il servait de retraite au bétail et aux bergers du pays et des environs, qui y déposaient même le fumier de leurs troupeaux. C'était, en toute vérité, l'abomination de la désolation dans le lieu saint.»
J. -B. Petitalot, 1910
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