Visite
à Nîmes de François Ier
en
1533.
RAPPEL : En 1516, le roi confirma aussi les privilèges des principales
villes de la province, entre autres , de celle de Nismes, qu'il appelle le
siège royal de la province, et le chef de la sénéchaussée de Beaucaire, dans
ses lettres datées du mois de Février suivant.
Ce prince étant à Lyon au mois d'Avril de l'an 1516 accorda
aux consuls et habitants de Nismes, et à leur prière, d’avoir pour
armes :
un taureau d’or en champ de
gueules,
mais ayant découvert depuis, plusieurs médailles de leur
colonie, sur lesquelles on voit :
un crocodile avec un palmier,
ils demanderont au roi de changer leurs armes et de leur
donner ces dernières, comme plus anciennes; sçavoir, le crocodile qu’ils
prirent d'abord pour une couleuvre, et le palmier, ce que le roi leur accorda
par des lettres du mois de Juin de l’an 1535. Le roi marque dans les
dernières lettres qu'il donne ces nouvelles armes à la ville de Nismes, tant
en considération de la vénérable antiquité dont il avoit toujours été
amateur, que pour l’estime qu'il avoit pour la ville de Nismes.
Dom Vaissete, 1730
-oOo-
LA VISITE A NÎMES DE
FRANCOIS Ier
par ALBIN MICHEL, 1876
François
Ier visite les monuments romains - Tableau de Colin,
collection musée des
beaux Arts Nîmes.
Le roi François I°`, venant de Toulouse, arriva à Nimes le
30 août 1533. La réception qui lui fut faite ne laissa rien à désirer pour le
luxe des décorations et des cadeaux offerts aux princes et aux principaux
seigneurs de sa cour.
On envoya à sa rencontre un corps de bourgeoisie formé de
cinq ou six cents hommes armés d'arquebuses et autres armes. Le roi fit son
entrée par la porte des Jacobins, aujourd'hui rue de la Couronne, et les rues
par lesquelles il passa furent tapissées et sablées. Quant à la reine, elle
prit son logement à Besouce. Parmi les cadeaux faits aux principaux
personnages de la famille ou de la suite du roi, nous voyons que dans
l'Assemblée des commissaires de la ville tenue le 15 juillet 1533 pour régler
les préparatif de l'entrée, le premier consul avait été d'avis de donner au
dauphin deux chevaux de main du pays ; à chacun des deux autres princes, ses
frères, un pareil cheval ; au grand maure et maréchal de Montmorency,
gouverneur de Languedoc, une médaille de prix de soixante-dix écus d'or, et
au légat du Saint Siège, qui était le cardinal du Prat, archevêque de Sens et
chancelier de France, des torches de cire blanche et deux pièces de vin
clairet.
Quant au présent destiné au roi, il mérite une mention
spéciale: il consistait en un plan relevé de l'amphithéâtre de Nimes en
argent massif. Les maîtres argentiers ou orfèvres de Nimes, chargés du
travail, s'obligèrent par contrat :
« de représenter tous les dehors de cet édifice en
élévation avec autant d'arcades et de colonnes qu'il y en avait, et d'y
suivre la même forme d'architecture ; de distribuer l'intérieur en degrés,
comme il y en avait autour de l'arène ; de le faire de forme ovale et d'y
mettre au milieu un palmier, auquel serait enchaînée une couleuvre et attaché
un chapeau de laurier ; de faire quatre portes à l'amphithéâtre, à chacune
desquelles serait placé un chevalier armé et monté sur un cheval. »
(1)
(1)
Voir Ménard, preuves titre, LXIX
Le prix en fut fixé à deux cent cinquante livres, outre
trente marcs d'argent que les commissaires s'obligèrent à leur fournir.
On érigea aussi sur la place de la Couronne, aujourd'hui
place de la Salamandre, une colonne en belle pierre blanche, au-dessus de laquelle
était une salamandre de même matière, avec l'inscription suivante
FRAN. F. RE.
PP. M. P. Q.
NEMAVSI
DD.
Ce qui signifie : François, roi de France, père de la
patrie, les magistrats et la peuple de Nimes ont élevé cette colonne.
L'idée de ce monument était heureuse, car on sait que
François 1er avait choisi la Salamandre pour son symbole avec ces mots Nutriscor
et extingvo ; je m'y nourris et je l'éteins, pour marquer sa
fermeté et les adversités dont sa vie fut traversée.
Cette colonne est restée en place jusqu'en 1793 ; démolie
alors, le fut seul a été conservé et se trouve aujourd'hui dans l'enceinte de
la Maison-Carrée, couché à terre à droite de la porto d'entrée.
Ne pourrait-on pas, sans gêner la circulation, rétablir ce
monument historique sur son ancien emplacement en l'entourant d'une petite
grille en fer. Cette idée devrait sourire à notre municipalité actuelle qui
met des grilles partout. (Cette déclaration de l’auteur, Albin Michel,
date de 1876)
La dépense générale de l'entrée du roi, nous dit Ménard,
monta d'un côté à la somme de cinq mille cent quatre vingt livres fournie
par la ville et à celle de trois mille quatre-vingt-quatre livres douze sols
six deniers, qui fut avancée par le receveur du diocèse. Ces deux sommes
réunies faisant la totalité de huit mille deux cent soixante-quatre livres,
reviennent, suivant l'évaluation de la livre minérale, à celle de cent
cinquante-quatre mille deux cent soixante une livres six sols huit deniers de
la monnaie d'aujourd'hui. (1758, époque de Ménard)
Le roi demeura quelques jours à Nimes, il y donna, pendant
son séjour, des preuves si particulières et si glorieuses de son goût pour
l'antiquité, que ce serait ravir à sa mémoire un des traits les plus
honorables dont l'histoire de sa vie puisse être ornée, que de n'en pas fixer
ici le souvenir.
Ce grand prince visita tous nos monuments avec une
attention particulière, il entra dans les plus bas caveaux de l'Amphithéâtre
et monta sur les masures de la Tourmagne afin d'en mieux concevoir la forme
et la symétrie. On le vit un genou en terre, nettoyer lui-même avec son
mouchoir la poussière qui couvrait les lettres des inscriptions romaines,
afin de les déchiffrer et de les lire avec plus de facilité.
(C'est cette scène qui a été reproduite par M. Colin,
ancien directeur de l'école de dessin de Nimes, et dont l'on voit le tableau
au musée des Beaux-Arts de Nîmes).
Plein d'admiration pour toutes ces grandes et anciennes
merveilles de l'art, François 1er parut comme indigné du peu de soin qu'on
apportait à les conserver et il témoigna publiquement la déplaisir qu'il
ressentait de cette négligence. De sorte qu'avant son départ, il ordonna la
démolition de quelques bâtiments qu'on avait laissé construire dans les deux
portiques de l'amphithéâtre et qui coupaient et masquaient l'ordre et la
suite des galeries. Il ordonna aussi la démolition de certains bâtiments
modernes qu'on avait ajoutés à la Maison-Carrée, soit dans l'intérieur, soit
au dehors de ce superbe édifice, dont les beautés se trouvaient par là comme
anéanties et ensevelies dans un tas de mauvaise maçonnerie qui le défigurait.
Le plan de l'Amphithéâtre ne fut livré, par les orfèvres,
à la ville de Nîmes qu'en 1535, et le premier consul Antoine Arlier, docteur ès
droits, fut chargé de se rendre à la Cour pour le présenter au roi.
François 1er, nous dit encore Ménard (1) reçut le présent avec
de grands témoignages de satisfaction ; il eut. la complaisance de
s'entretenir avec le député sur tout ce que contenait le plan ou la
représentation de l'amphithéâtre. Il lui demanda entre autres, l'explication
du symbole et des figures du palmier, ainsi que du crocodile et de la
couronne de laurier qui y étaient attachés.
(1)
Ménard, tome 4, livre 12, chapitre 43
Le docteur Arlier la lui donna, mais avec des erreurs qui
marquent le peu de connaissance qu'on avait alors du vrai sens des monuments
de l'antiquité, appelant le crocodile une couleuvre et interprétant les mots
COL. NEM par ceux de Coluber Nemauseusis.
Ce symbole néanmoins frappa le roi, surtout lorsqu'il
apprit que c'était le type d'une ancienne médaille de Nimes. L'amour de
François 1er pour l'antiquité lui fit naître le dessein de donner ces figures
pour armoiries à la ville de Nîmes, au lieu du taureau d'or qu'elle avait
pris depuis peu.
Ce fut en effet par les lettres patentes de Juin 1535 données
à Coucy que cette concession fut faite et que la ville de Nimes a pris pour
armoiries, sur son ancien champ de gueules, les figures du crocodile enchaîné
à un palmier avec une couronne de laurier et les mots COL. NEM. qui signifie Colonia
Nemausensis.
MM. Simon Durant, Henri Durand et Eugène Laval, dans leur
album archéologique du Gard, nous donnent, sur l'ancienne médaille de Nimes
qui frappa l'attention de François 1er, les renseignements suivants :
L'Empereur Auguste, traversant les Gaules, composa la
Colonie Nîmoise de ses vétérans qu'il avait ramenés des bords du Nil, c'est
ce qu'indique la médaille de moyen bronze que la ville de Nîmes fit frapper
en son honneur. Elle rappelle la bataille d'Actium, qui avait assuré à César
la conquête de l'Egypte et l'empire du monde. Un côté de la médaille
représente la tête de César-Auguste couronné de laurier , et celle de M.
Vipsanius Agrippa, qui avait puissamment contribué au succès de cette
mémorable journée. Cette dernière est ornée d'une couronne rostrale,
l'exergue porte
IMP
P P
DIV. F.
Sur le revers on voit an crocodile enchaîné à an palmier
d'où pend une couronne avec cette légende
COL. NEM
MM. Grangent, Ch. Durand et Simon Durand, dans leur
description des monuments antiques de la France (page 19, introduction)
disent que cette médaille fut trouvée en 1517 en fouillant le tombeau de St
Baudile.
Extrait de Nîmes et ses rues, Albin Michel, page 315 à 320, édition
Clavel Nîmes, 1876.
-
-oOo-
-
HISTOIRE
DE LA VILLE DE NIMES
Livre
douzième.
Léon
Ménard, 1758.
-
- XXXIII.
- Le roi François ler vient en Languedoc, ainsi que la reine,
sa femme, et les trois princes, ses enfants. Préparatifs qu'on
fait à Nîmes pour leur entrée. (An
de J.-Ch. 1533.)
-
- Cette
année 1533, le roi François Ier fit un voyage dans les
provinces méridionales du royaume : voyage qui avait pour
objet une entrevue à Marseille, dont ce prince était
convenu avec le pape Clément VII, pour la conclusion du
mariage entre le duc d'Orléans, son second fils, et Catherine
de Médicis, nièce du pape.
-
- On
eut avis à Nîmes, par une lettre du seigneur de Clermont
aux consuls, que le roi devait partir de Lyon le lendemain de la fête
de saint Jean-Baptiste, pour s'en aller au Puy, et de là
à Toulouse ; que la reine, qui était Eléonor
d'Autriche, femme du roi, partirait de Lyon le même jour, avec
les trois princes ses enfants, savoir le dauphin et les ducs
d'Orléans et d'Angoulême, et viendrait, en côtoyant
le Rhône, jusqu'en Languedoc, pour aller trouver le roi à
Toulouse.
-
- Sur
cet avis, on tint un conseil extraordinaire, le 26 de juin, à
l'évêché, où présida Jean
Albenas, lieutenant du sénéchal, afin de déterminer
la pompe de l'entrée et du roi, lorsqu'à son retour il
passerait par Nîmes, et de la reine et des princes ses enfants.
-
- On
voulait faire l'entrée du roi des plus magnifiques, parce que
c'était la première fois que ce prince honorait la
ville de sa présence. Le conseil chargea de donner ordre à
tout quelques commissaires qu'il nomma pour cela, qui furent les
quatre consuls, le juge royal ordinaire, le prévôt de la
cathédrale ; Antoine Arlier, docteur ; Tanneguis le Vallais,
contrôleur du domaine ; Pierre de Malmont, licencié ;
Léonard Teissier, maitre des monnaies et Aimé Boffard.
-
- Quant
à la dépense, il fut délibéré
d'inviter l'évêque de Nîmes, les bénéficiers,
les nobles et les officiers du roi. d'y contribuer, et cependant
d'imposer ou d'emprunter jusqu'à concurrence de la somme
de trois mille livres Tournois et davantage, s'il le fallait.
-
- En
conséquence de ce dernier article de la délibération,
Jean d'Airebaudouse, receveur particulier du diocèse de
Nîmes, se rendit avec le premier consul et le contrôleur
du domaine du roi au Vigan, où se trouvait alors l'évêque
de Nîmes, pour prier ce prélat de prêter à
la ville la somme de trois mille livres, dont elle avait besoin dans
cette occasion.
-
- Au
reste, les commissaires nommés par le conseil extraordinaire
s'assemblèrent le 13 de juillet suivant, non point à
l'hôtel de ville, parce qu'il y avait dans ce quartier quelque
danger de peste, mais dans la maison du prévôt de la
cathédrale, où ils appelèrent Jean Albenas,
lieutenant du sénéchal et l'avocat du roi de la
sénéchaussée.
-
- Avant
que de; rien arrêter, chacun fit serment entre les mains du
prévôt de tenir secret tout ce qui aurait été
délibéré, par la crainte qu'on avait que
les villes par où devait passer le roi avant que de venir à
Nîmes, n'en fissent usage pour elles-mêmes.
-
- Au
surplus, le résultat de l'assemblée fut qu'on ferait
présent au roi d'un plan de l'amphithéâtre de
Nîmes en relief et en argent fin, du poids de trente marcs, ce
qui ne pouvait que lui être extrêmement agréable,
par le goût particulier que ce prince avait pour les choses
antiques ; qu'on donnerait à la reine une coupe d'or fin, de
la valeur de cent vingt écus, et que pour les présents
des princes et des principaux seigneurs de la cour, on verrait comme
les autres villes auraient fait.
-
- Quant
à l'entrée du roi, il fut arrêté qu'elle
se ferait par la porte des jacobins ; qu'on ornerait cette porte
de figures et d'emblèmes, dont on laissa le soin et la
direction au docteur Arlier, et que pour travailler aux décorations
on emploierait le nombre de peintres nécessaire. On délibéra
enfin d'appeler les diocésains pour leur communiquer le tout ;
et les faire contribuer à la dépense.
-
- XXXIV.-
La reine Eléonor arrive à Nîmes avec les princes
ses enfants. La ville lui fait présent d'une coupe d'or. (An
de J.-Ch. 1533.)
-
- Peu
de jours après, et non point au mois de juin , comme le dit
un moderne, la reine Eléonor arriva à Nîmes, avec
les princes ses enfants. Son entrée fut solennelle et
pompeuse. On n'oublia rien pour lui rendre tous les honneurs qui lui
étaient dus.
-
- Les
consuls lui présentèrent la coupe d'or qu'on avait
délibéré de lui donner. De Nîmes, la reine
continua sa route, et se rendit à Toulouse, où elle fit
son entrée le samedi 2 d'août de cette année
1533. Le roi y avait fait la sienne la veille.
-
- XXXV.- On continue les
préparatifs pour l'entrée du roi. On fait marché
avec des orfèvres pour un plan de l'amphithéâtre
en relief et en argent que la ville devait présenter au roi.
-
- On
continuait cependant à faire des préparatifs à
Nîmes pour y recevoir le
roi, à son arrivée du Haut-Languedoc. Les commissaires
nommés par le conseil de ville extraordinaire, assistés
d'un consul d'Alais, et d'un envoyé pour le consul d'Anduze,
firent marché, le 7 de ce mois d'août, avec deux maîtres
argentiers ou orfèvres de Nîmes, pour faire le plan
relevé de l'amphithéâtre en argent, dont on était
convenu de faire présent au roi. Par le contrat qu'ils
passèrent avec ces orfèvres, ceux-ci s'obligèrent
de représenter tous les dehors de cet édifice en
élévation, avec autant d'arcades et de colonnes qu'il y
en avait, et d'y suivre la même forme d'architecture ; de
distribuer l'intérieur en degrés, comme il y en avait
autour de l'arène ; de le faire de forme ovale, et d'y mettre
au milieu un palmier, auquel serait enchainée une couleuvre,
et attaché un chapeau de laurier ; de faire quatre portes à
l'amphithéâtre, à chacune desquelles serait placé
un chevalier armé, et
monté sur un cheval. Ils promirent d'avoir entièrement
achevé cet ouvrage dans l'espace d'un mois ou environ, et de
le faire aussi somptueux et parfait qu'on pouvait le désirer,
au jugement de maitres experts, tant d'Avignon que de Lyon et de
Paris.
-
- Le
prix en fut fixé à deux cent cinquante livres, outre
trente marcs d'argent que les commissaires s'obligèrent de
leur fournir.
-
- D'un
autre côté, le 10 du même mois, le conseil
délibéra d'envoyer audevant du roi un corps de
bourgeoisie, formé de cinq ou six cents hommes, armés
d'arquebuses, et autres armes, avec des enseignes et en bon ordre, de
faire porter par les consuls le dais destiné pour le roi, de
leur faire faire des chaperons neufs, et de leur donner quatre valets
à leur suite, qui seraient habillés de drap de couleur
fine.
-
- XXXVI.
- Le roi François Ier fait son entrée à Nîmes.
On y érige une colonne en son honneur. (An
de J.-Ch. 1533.)
-
- Le
roi, ayant demeuré quelques jours à Toulouse, continua
sa route par Narbonne, Béziers, Pézenas et Montpellier.
Il demeura neuf jours en cette dernière ville. Il y donna le
21 de ce mois d'août une déclaration pour faire tenir
les grands jours à Tours. Il vint ensuite à Nîmes
où on lui fit une entrée des plus pompeuses. On fit
tapisser et sabler toutes les rues où il devait passer. Il
entra dans la ville par la porte des Jacobins, comme l'on en était
convenu.
-
- La
ville avait eu soin de faire préparer et meubler les logements
des princes ses enfants et de toute la cour. La reine prit son
logement à Bezouce. On fit des présents aux princes et
aux seigneurs les plus distingués de la suite du roi. Nous ne
savons pas précisément en quoi consistèrent ces
présents, mais je vois que dans l'assemblée des
commissaires de la ville, tenue le 15 de juillet précédent,
pour régler les préparatifs de l'entrée, le
premier consul avait été d'avis de donner au dauphin
deux chevaux de main du pays ; à chacun des deux autres
princes ses frères, un pareil cheval ; au grand maître
et maréchal de Montmorency, gouverneur de Languedoc, une
médaille du prix de soixante-dix écus d'or ; au légat
du Saint-Siège, qui était le cardinal du Prat,
archevêque de Sens et chancelier de France, des torches de cire
blanche et deux pièces de vin clairet.
-
- Quant
au présent du plan relevé de l'amphithéâtre
en argent, qu'on avait destiné pour le roi, la ville ne put
pas le lui donner en cette occasion. L'ouvrage n'était
pas alors achevé ni perfectionné. Elle le lui envoya
dans la suite, comme nous le verrons bientôt.
-
- Outre
les décorations et la pompe éclatante d'une entrée
somptueuse, les habitants de cette ville érigèrent
alors, en l'honneur du roi, une colonne de pierre, presqu'aussi belle
que le marbre, au dessus de laquelle était une salamandre de
Nîmes matière, avec une inscription latine, telle que je
la figure ici :
-
FRAN.
F. RE.
PP.
M. P. Q.
NEMAUSI
DD.
-
- (c'est
à dire Franscisco Francorum regi. patri patriœ,
magistratus, populusque Nemausi dediicaverunt.)
-
- Cette
colonne fut érigée dans une des places de Nîmes
qui se trouve près de la porte de la Couronne, et qui a depuis
porté le nom de la place de la Salamandre.
-
- L'idée
de ce monument était heureuse. On sait que François
Il, avait choisi la salamandre pour son symbole, avec mots :
Nutriscor
et extinguo
: Je m'y nourris et je l'éteins, pour marquer sa fermeté
et les adversités dont sa vie fut traversée.
-
- Remarquons
au reste, que la dépense générale de cette
entrée monta d'un côté à la somme de cinq
mille cent quatre-vingts livres, qui fut d'abord la première
somme employée, et de l'autre côté, à
celle de trois mille quatre-vingt-quatre livres douze sols dix
deniers, qu'il fallut y ajouter, et qui fut avancée par le
receveur du diocèse ; ce qui était bien considérable,
et annonce une fête somptueuse, puisque ces deux sommes
jointes, faisant la totalité de huit mille deux cent
soixante-quatre livres, reviennent, suivant l'évaluation
de la livre numérale, à celle de cent cinquante-quatre
mille deux cent soixante une livres six sols huit deniers de la
monnaie d'aujourd'hui. Ces sommes furent réparties et
imposées sur le diocèse de Nîmes.
- XXXVII.
- Le roi visite les monuments anciens de Nîmes. Il ordonne des
réparations à l'amphithéâtre et à
la Maison Carrée. (An de J.-Ch. 1533.)
-
- Le
roi demeura quelques jours à Nîmes. Il y donna, pendant
son séjour, des preuves si particulières et si
glorieuses de son goût pour l'antiquité, que ce serait
ravir à sa mémoire un des traits les plus honorables
dont l'histoire de sa vie puisse être ornée, que de n'en
pas fixer ici le souvenir.
-
- Ce
grand prince, avide des beautés du règnent dans les
anciens monuments de cette ville, les visita tous avec une
attention particulière. II entra dans les plus bas caveaux de
l'amphithéâtre. Il monta sur les masures de la
Tourmagne, afin d'en mieux concevoir la forme et la symétrie.
Il n'y eut, en un mot, rien de remarquable en édifices et en
monuments anciens, qu'il ne parcourût.
-
- On
le vit un genou en terre, nettoyer lui-même avec son mouchoir
la poussière qui couvrait les lettres des inscriptions
romaines, afin de les déchiffrer et de les lire avec plus de
facilité. Plein d'admiration pour toutes ces grandes et
anciennes merveilles de l'art, il parut comme indigné du peu
de soin qu'on apportait à les conserver, et il témoigna
publiquement le déplaisir qu'il ressentait de cette
négligence.
-
- De
sorte qu'avant son départ même, il ordonna la démolition
de quelques bâtiments qu'on avait laissé construire dans
les deux portiques de l'amphithéâtre, et qui
coupaient et masquaient l'ordre et la suite des galeries. Il ordonna
aussi la démolition de certains bâtiments modernes qu'on
avait ajoutés à la Maison Carrée, soit dans
l'intérieur, soit au dehors de ce superbe édifice, dont
les beautés se trouvaient par là comme anéanties
et ensevelies dans un tas de mauvaise maçonnerie qui le
défigurait.
-
- XXXVIII
- Il part de Nîmes, va à Avignon et de là à
Marseille. (An de J.-Ch. 1533.)
-
- De
Nîmes, le roi alla à Avignon. Il y était le 5 de
septembre de cette année 1533. Il se rendit ensuite à
Marseille, où il eut au mois d'octobre suivant, avec le pape
Clément VII, l'entrevue dont ils étaient convenus. Le
mariage du duc d'Orléans , son second fils , avec la nièce
du pape, y fut célébré.
-
- XLIII.
-Le roi François ler donne pour armes à la ville de
Nîmes le type de l'ancienne médaille de sa colonie. (An
de J.-Ch. 1535.)
-
Dans
un conseil ordinaire, assemblé le mercredi 24 de février
de l'an 1534 (1535), on annonça que le plan de l'amphithéâtre,
en relief et en argent, qu'on avait délibéré de
donner au roi, était enfin entièrement fini et
perfectionné, et qu'il serait remis le mercredi suivant dans
l'Hôtel de Ville.
-
Dès
que les consuls l'eurent reçu, on songea de l'envoyer
incessamment au roi. Ce fut le premier consul, qui était alors
Antoine Arlier, docteur èsdroits, qu'on députa
pour le lui aller présenter au nom de la ville. Ce député
se mit en chemin, et se rendit bientôt à la cour.
-
Le
roi reçut le présent avec de grands témoignages
de satisfaction. II eut la complaisance de s'entretenir avec le
député sur tout ce qui contenait le plan ou la
représentation de l'amphithéâtre. Il lui demanda,
entre autres, l'explication du symbole et des figures du palmier,
ainsi que du crocodile et de la couronne de laurier, qui y
étaient attachés.
-
Le
docteur Arlier la lui donna, mais avec des erreurs qui marquent le
peu de connaissance qu'on avait alors du vrai sens des monuments de
l'antiquité, appelant le crocodile une couleuvre et
interprétant les mots COL NEM par ceux de coluber
Nemausensis.
-
Ce
symbole néanmoins frappa le roi, surtout lorsqu'il apprit que
ç'avait été le type d'une ancienne médaille
de Nîmes. L'amour de François Ier pour l'antiquité,
lui fit naitre le dessein de donner ces figures pour armoiries à
la ville de Nîmes, au lieu du taureau d'or qu'elle avait pris
depuis peu : circonstance bien glorieuse pour cette ville,
puisqu'elle tient du pur mouvement de ce prince les armes
qu'elle porte encore.. Ses registres disent en effet que ce
changement s'était fait de la propre volonté du roi. La
concession
en fut faite par des lettres du mois de juin de l'an 1535, que le
roi François Ier donna étant à Couci, et non
point à Kuc, comme le portent mal à propos les
copies qui nous restent.
-
Le
roi y donne pour armoiries à la ville de Nîmes, sur
son ancien champ de gueules, les figures du crocodile, de palmier et
de la couronne de laurier, de sinople, avec ces mots: COL NEM d'or,
ainsi que la chaine, représentées de la même
manière qu'on les voyait sur le revers des anciennes
médailles, armoiries dont il fit faire une empreinte sur
les lettres même ; ordonnant la suppression du taureau, avec
ordre au sénéchal de Beaucaire de faire jouir les
consuls et les habitants de Nîmes de cette concession, et de
contraindre les consuls à n'employer désormais que ces
nouvelles armes, tant en leurs sceaux que sur les portes de la ville,
et autres endroits accoutumés.
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