Alphonse Daudet Version édulcorée du Petit chose (deuxième partie) Suite au succès du Petit Chose, parus chez Hertzel en début d'année 1868, certains de ses amis vont regretter certains passages un peu osés pour l'époque. L'histoire d'un enfant, ne pouvait être mise entre toutes les mains, et surtout distribuée dans les écoles. L'ami de Daudet, Pierre-Jules Hetzel. (éditeur et écrivain sous le pseudonyme P.J. Stahl, qui signera Tom Pouce), réécrira certains passages avec l'accord d'Alphonse Daudet pour en faire une édition pour enfants. Cette deuxième version un peu édulcorée, paraitra en 1877 avec cette mention : Histoire d'un Enfant. Édition à l'usage de l'enfance et de la jeunesse. Voici ci-dessous la préface de P.J. Stahl, et un morceau choisi dans les deux versions, à gauche l'originale à droite la version édulcorée. EDITION
ORIGINALE
Préface de Pierre-Jules Stahl (pseudo de l'éditeur Hetzel) LE PETIT CHOSE A L'USAGE DE L'ENFANCE ET DE LA JEUNESSE Quand,
à son apparition, j'ai lu pour la première fois le ravissant livre
de M. Alphonse Daudet : - Le Petit Chose, Histoire d'un enfant, -
j'ai été saisi du regret que ce livre excellent, qui contenait tant
de choses exquises à l'usage de l'enfance et de la jeunesse, fût
cependant de ceux qui ne pouvaient, dans son complet, être mis entre
les mains des enfants. Quelques chapitres, quelques épisodes,
quelques figures accessoires le rendaient seuls impropre à cet
usage; et pourtant, dans sa généralité, dans son ensemble,
n'était ce pas là un de ces livres heureux, dont l'enfant, le
jeune homme et la jeune fille eussent dû cire les lecteurs
naturels, les lecteurs par privilège ? C'est si rare le livre
qui dit de l'enfance, et à l'enfance ce qui pourrait l'instruire et
la charmer, que j'en voulais presque à l'auteur d'avoir ajouté
à sa perle
ce surcroît de pierres précieuses, cette monture trop riche qui ne
permettait plus de l'offrir à la jeune fille, d'en parer l'enfant.
Je fis part un jour de mes regrets à M. Alphonse Daudet : « Eh! mon Dieu ! me répondit-il, vous avez pressenti la vérité. J'avais commencé ce livre pour les enfants; et j'ai regreffé plus d'une fois de ne pas l'avoir achevé comme je l'avais commencé. Si je ne l'ai pas fait, ce n'est pas dédain pour les œuvres qui conviennent à l'enfance; quel est l'écrivain qui ne s'estimerait heureux, qui ne serait fier d'avoir écrit le Petit Chaperon rouge ou le Petit Poucet ? C'est que le Petit Chose ayant peu à peu dévié a fini par se trouver destiné à un public moins spécial, et que peu à peu je suis sorti, en l'achevant, de mon vrai sujet. Je n'aurais pas le courage de le remettre au point; mais si vous, Stahl, vous vouliez prendre ce soin de le rendre à sa destination première, vous me donneriez là une vraie preuve de bonne amitié littéraire et me feriez grand plaisir. » La tâche, tout d'abord, me sembla de celles qu'il n'est pas aisé de mener à bonne fin. Je me disais bien qu'il ne s'agissait, après tout, que de coupures à faire. - Mais couper dans une œuvre d'Alphonse Daudet, dans une œuvre accomplie, était chose en soi délicate et douloureuse. Désenrichir un joyau, c'était un petit vandalisme dans son genre. Je m'y résignai cependant dans l'intérêt d'un public auquel je n'ai ménagé les sacrifices ni dans mes œuvres mêmes, ni dans celles des autres. Quelle mère m'en voudra de cette faiblesse que j'ai pour nos enfants de France, et quel critique me refusera son pardon alors qu'Alphonse Daudet lui-même m'a demandé d'être coupable et me remercie de l'avoir été ? Toujours est-il que je crois avoir fait œuvre utile en faisant rentrer ce bijou, cet objet d'art, dans la Bibliothèque d'éducation et de récréation. Elle lui devra un éclat nouveau et j'espère qu'on saura gré à, Alphonse Daudet de m'y avoir si obligeamment encouragé. P.
J. Stahl.
Les
deux versions du Petit Chose.
Alphonse Daudet Coauteurs ou plagiats
Lors
de la séance de l'académie de Nîmes du 24 Avril 1936, M. Marcel
Coulon fait une communication sur : Alphonse Daudet, Paul Arène et
les Lettres de mon Moulin.
Il y a longtemps, dit-il, que les contemporains d'Alphonse Daudet ont renoncé à soutenir que les « Lettres de mon Moulin » sont de Paul Arène, si longtemps qu'on reste surpris que l'Académie ait entendu l'autre jour cette affirmation se produire,, Avant d'être publiées en volume (1869), les dits Lettres parurent dans, I' « Evènement » et le « Figaro ». Les cinq premières portaient la signature « Marie-Gaston » pseudonyme cachant pour les lecteurs, mais non point pour les milieux littéraires, les noms de Daudet et d'Arène. Toutes les autres furent signées Alphonse Daudet. Le fait de cette collaboration, laquelle cessa après la onzième lettre, n'a jamais été nié par Daudet ; on le trouvé même proclamé dans son « Histoire de mes livres. » Quant à Paul Arène, il s'en est expliqué clairement sous forme de lettre à Daudet, au « Gil Blas » du 16 décembre 1883. Sa collaboration a porté (dit-il), sur « la moitié à peu près » des 23 lettres recueillies dans le volume. Les autres, ajoute-t-il « ne me regardent en rien et encore, dans celles qui me regardent un peu, ta part reste-t-elle la plus grande, car si j'ai pu y apporter quelques détails de couleur ou de style, toi seul, toujours en trouva le jet et les grandes lignes ». Cette lettre qui fait honneur à la loyauté d'Arène, met hors de question la probité de Daudet et souligne l'amitié fraternelle qui ne cessa d'unir les deux écrivains. M. Marcel Coulorj a renvoyé pour plus amples renseignements à la préface de la « Veine d'Argile », recueil posthume d'Arène, publiée en 1928 par M. Hubert Dhumez. Il a ajouté qu'à son avis une étude comparative du talent de conteur d'Arène et du génie de conteur de Daudet, mettrait en lumière l'invraisemblance de l'accusation dont il s'agit. D'intéressantes réflexions de MM. Roche, Terrin et Fabre ont terminé la séance.
-oOo-
Alphonse Daudet sa jeunesse peu connue Alphonse
Daudet, arrivera à Alès le soir du 1er mai 1857. Né à Nîmes le
13 mai 1840, il avait alors 17 ans. Il n'avait pas encore passé son
BAC. Sa venue au collège d'Alès avec son petit salaire de pion à
la clé résolvait une partie des problèmes financiers de la
famille. Certaines biographies lui donnent l'âge de 16 ans, voire
15, pourquoi ? Pour en faire un surdoué !
Arrivé à Alès, le 1er mai 1857, Alphonse retournera chez lui la tête basse, le 27 ou 28 octobre de la même année. Il avait été renvoyé pour avoir séduit la fille du principal. Ayant confié son aventure à un collègue, ce dernier le dénoncera auprès du père, et comble de malchance celui-ci trouvera dans les affaires de sa fille des lettres enflammées d'Alphonse. Ces renseignements sont donnés par Marcel Bruyère dans son livre "La jeunesse d'Alphonse Daudet". Pour terminer cette période scolaire peu glorieuse de notre grand personnage, (qui a donné son nom à maints établissements scolaires) (1), lors de son séjour à Alès il devait en profiter pour poursuivre ses études et passer son BAC en août. C'était son grand désir, il l'avait écrit dans une lettre, envoyée le 26 avril 1857 à son cousin Louis. Hélas ! ses beuveries dans un café (café Barbette, voir livre de Marcel Bruyère) et ses ennuis dans sa fonction de surveillant, ont détourné notre héros de cet objectif. Alphonse ne passera jamais son BAC. Pourtant, cette vie dissolue ne peut occulter son talent précoce, n'avait-il pas écrit en novembre 1855 un poème "un enfant d'un jour", empreint d'aisance et de spontanéité ? "Ce
poème fut composé à l'occasion de la naissance à Nîmes, le 15
novembre 1855, d'un cousin d'Alphonse, Louis-Antoine Montégut, fils
de Louis-Hippolyte-André Montaigut, qui avait épousé, le 16
janvier 1855, Antoinette Vernez, la fille de Marcel et de Zoé-Aguathe
Reynaud."
ENFANT
D'UN JOUR - ALPHONSE DAUDET, 1855
(1)
De
1870 à 1914 la France était divisée en deux, tout était tranché,
pas de nuances. Il y avait les blancs (anti-laïques, cléricaux, et
anti-dreyfusards) et les rouges (laïques, anti-cléricaux et
dreyfusards). Avant Jules Ferry, dans le système éducatif, les enseignants étaient désignés conjointement, par une autorité politique locale et par l'évêque. L'enseignement des jeunes filles était donné uniquement par des religieuses. C'est Jules Ferry qui imposera la laïcité dans tout l'enseignement public, l'enseignement primaire devenant obligatoire pour la rentrée scolaire 1881-82. Alphonse Daudet était blanc, et de plus, militant engagé. Son frère, ses enfants et petits-enfants le seront encore plus ! Ils étaient donc, dans un clan opposé à la laïcité. Une question ! Combien d'établissements scolaires publics et laïques portent-ils en France le nom d'Alphonse Daudet ? A Nîmes, lors de la délibération du Conseil Municipal du 10 juillet 1963, le Lycée de Garçon sera dénommé Lycée Alphonse Daudet, suite à une demande du Conseil d'administration du Lycée ! Sans commentaires. -oOo- EN SAVOIR PLUS SUR LA VIE DE DAUDET > En avril 1857 arrivée du petit chose à Sarlande. Alphonse Daudet âgé de 17 ans à Alès> La version édulcorée du Petit Chose > Le Nabab - La véritable histoire de son modèle, l'exentrique François Bravay > Alphonse Daudet antisémite ? > Alphonse Daudet adulte, était-il encore un nîmois de coeur ? > La maladie cachée de Daudet, La Doulou (La douleur) > Polémique sur l'inauguration statue de Daudet à Nîmes > Article Midi Libre du 26 juin 2005 |