XIVe siècle, Saint-Louis à Aiguesmortes

par M. Charles Lenthéric, membre de l'académie du Gard

Extrait des Mémoires de l'Académie du Gard, 1868-1869, pages 173 à 233.  

 

 

RÉSUMÉ

 

Un des premiers, Lenthéric, démystifie l'idée populaire qui veut que la mer soit à Aigues-Mortes aux XIIIe siècle.

 

Et il élabore une théorie, (la théorie de Lenthéric) selon laquelle St Louis embarque, au bord de l'étang de la Marette qui bordait la ville. Il a suivi un chenal (le canal-viel) et a pris la mer au Grau-Louis.

 

Le Grau-Louis protégé par un banc de rochers à quelques centaines de mètres de la rive était un lieu idéal de mouillage.

.

Sept cent ans plus tard on y construira un port de plaisance: La Grande Motte.

 

Extrait du texte de Lenthéric.

 

La situation du littoral d'Aiguesmortes, depuis l'antiquité jusqu'à nos jours, a subi les modifications suivantes. Aux époques les plus reculées, et vraisemblablement antéhistoriques, la mer a recouvert toute la plaine comprise entre Aiguesmortes et le rivage actuel, et les alluvions marines se retrouvent jusqu'au premier cordon littoral qui constitue le prolongement du massif, de la Sylve-Godesque.

 

L'action combinée des vents et des courants du large (sud et sud-est), détermine peu à peu une série de cordons littoraux qui détachent successivement du domaine maritime, d'abord les étangs de Leyran, puis ceux de la Marette, de la Ville et du Roi, enfin, ceux du Repausset et du Repos.

 

Ces étangs, qui faisaient tous partie de l'estuaire du Rhône, paraissent avoir existé depuis les temps les plus anciens, bien que leur configuration générale, leurs dimensions, et surtout leurs profondeurs aient été l'objet de transformations continues.

 

Depuis le XIIIe siècle et même depuis une époque certainement beaucoup plus éloignée, la plage actuelle, désignée sous le nom de Boucanet, n'a pas éprouvé de variation sensible, mais la situation générale du pays s'est complètement modifiée, les forêts qui existaient aux VIIIe, IXe, et Xe siècles ont été détruites, le fond des étangs, qui étaient alimentés par le Rhône, s'est considérablement exhaussé. Les branches des deux Rhône-morts, qui venaient se perdre dans les étangs voisins d'Aiguesmortes, se sont complètement atterries. Il en est de même du Rhône-vif, dérivé sous François Ier et dont le grau (Grau-Neuf) a cessé de fonctionner.

 

A l'époque de S. Louis, la communication entre la mer et les étangs, n'avait lieu que par un grau naturel, situé assez loin, à l'Ouest, sur le territoire actuel du département de l'Hérault, et dont l'ouverture était protégée par un banc de rochers, formant une sorte de rade naturelle. Les travaux exécutés par S. Louis ont eu pour objet le curage de la partie de l'étang de la Marette qui formait alors le port d'Aiguesmortes, et le recreusement du Canal-Viel et du grau situé à l'embouchure, qui a porté depuis cette époque le nom de Grau-Louis.

 

L'ensemble du port d'Aiguesmortes, au temps de S. Louis, comprenait donc le port proprement dit; qui, se trouvait dans les parties profondes de l'étang de la Marette, le Canal-Viel et le Grau-Louis, protégé par le banc de rocher dont il vient d'être question.

 

Quelques années plus tard, un nouveau grau s'ouvre à l'Est du Grau-Louis. Ce grau commençait à se former à l'époque de S. Louis, mais il n'était qu'à l'état de grau d'alimentation ou de déver­sement pour les étangs, et ne pouvait encore être utilisé pour la navigation.

 

Sous l'empire des souvenirs des récentes expéditions, on le nomme Grau-de-Croisette et il devient navigable, pendant que le Grau-Louis et le Canal-Viel commencent à s'ensabler.

 

En même temps, Philippe le Hardi fait construire les remparts et la digue de la Peyrade, et le port; déplacé dans l'étang de la Ville, se trouve ainsi réuni à la mer par un nouveau chenal plus direct et protégé; sur plus d'un kilomètre, par une digue monumentale,, qui peut servir d'abri aux navires.

 

Cette situation, très-différente de celle qui existait du temps de S. Louis, dure de­puis la fin du XIIIe siècle jusqu'au commencement du XVIIIe, et constitue une amélioration sensible sur la navigation par le Canal-Viel et le Grau-Louis.

 

Au commencement du XVIIIe siècle, le Grau de croisette se trouvant â peu prés ensablé, on reconnaît alors l'insuffisance et l'instabilité des graus naturels et on ouvre, en 1725, le Grau-du-Roi à travers le cordon littoral qui sépare la mer de l'étang du Repausset.

 

C'est l'état actuel, qui, sauf quelques rectifications et quelques travaux d'entretien de peu d'importance, n'a pas été sensiblement modifié depuis près d'un siècle et demi, de telle sorte que le port d'Aiguesmortes, délaissé aujourd'hui, malgré les souvenirs glorieux qui s'y rattachent, est arrivé à un état de dépérissement à peu prés complets, alors que tous les ports de la Méditerranée ont été l'objet de travaux immenses, qui leur ont permis de satisfaire aux exigences toujours croissantes du commerce et de la navigation.

 

Charles LENTHÉRIC

 

EN SAVOIR PLUS SUR LA BAIE D'AIGUEMORTES

> I - Opinions diverses sur les limites du littoral d'Aiguemortes au XIIIe siècle.

> II - L'estuaire du Rhône au moyen-âge.

> III - Le port au XIIIe siècle - Le canal-viel et le Grau-Louis.

> IV - La Peyrade - Le Grau de Croisette.

> V - Carte de la baie d'Aiguesmorte en 1870 et trajet de St Louis.

> VI - Carte de la Peyrade.


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