les rois mages

Vous écoutez "La Marche des Rois".

 

L'auteur des paroles n'est autre que Joseph Domergue, curé doyen d'Aramon de 1691 à 1728, mort à Avignon en 1729.

Elle a été publiée pour la première fois en 1763 dans un recueil de noëls provençaux de Saboly.

La musique empruntée à la messe de turenne, est attribuée à Lulli.

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D'après l'Évangile selon Saint Matthieu :

Jésus étant né à Bethléem de Judée au temps du roi Hérode, voici que des mages venus d'Orient se présentèrent à Jérusalem et demandèrent : «Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu en effet son astre se lever et sommes venus lui rendre hommage.» Informé, le roi Hérode s'émut, et tout Jérusalem avec lui...

Alors Hérode manda secrètement les mages, se fit préciser par eux la date de l'apparition de l'astre et les dirigea sur Bethléem en disant : «Allez vous renseigner exactement sur l'enfant ; et quand vous l'aurez trouvé, avisez-moi, afin que j'aille, moi aussi, lui rendre hommage.»

Sur ces paroles du roi, ils se mirent en route ; et voici que l'astre, qu'ils avaient vu à son lever, les devançait jusqu'à ce qu'il vînt s'arrêter au-dessus de l'endroit où était l'enfant. La vue de l'astre les remplit d'une très grande joie. Entrant alors dans le logis, ils virent l'enfant avec Marie sa mère, et tombant à genoux, se prosternèrent devant lui ; puis, ouvrant leurs cassettes, ils lui offrirent en présent de l'or, de l'encens et de la myrrhe. Après quoi, un songe les ayant avertis de ne pas retourner chez Hérode, ils prirent une autre route pour rentrer dans leur pays.

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Les rois mages
d'Edmond Rostand
Ils perdirent l'Étoile, un soir ; pourquoi perd-on
L'Étoile? Pour l'avoir parfois trop regardée
Les deux rois blancs, étant des savants de Chaldée
Tracèrent sur le sol des cercles au bâton
Ils firent des calculs, grattèrent leur menton
Mais l'étoile avait fuit, comme fuit une idée
Et ces hommes dont l'âme eut soif d'être guidée
Pleurèrent, en dressant des tentes de coton
Mais le pauvre Roi noir, méprisé des deux autres
Se dit "pensons aux soifs qui ne sont pas les nôtres,
Il faut donner quand même à boire aux animaux"
Et, tandis qu'il tenait son seau d'eau par son anse
Dans l'humble rond de ciel ou buvaient les chameaux
Il vit l'Étoile d'or, qui dansait en silence.

 

Dessin de Rol. Rapin, artiste peintre

 > pages de Roland Rapin

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Voici 3 versions des paroles !!!

 

version provençale.

 

De - matin,
Ai rescountra lou trin
De tres grand Rei qu'anavoun en voiagi ;
De - matin,
Ai rescountra lou trin
De tres grand Rei dessu lou grand camin :
Ai vist d'abord
De gardo - cors,
De gen arma em'uno troupo de pagi,
Ai vist d'abord
De gardo - cors,
Touti dauras dessus sei justaucors.
Lei drapeou
Qu'eroun segur fort beou,
Ei ventoulet servien de badinagi ;
Lei cameou,
Qu'eroun segur fort beou,
Pourtavoun de bijou touti nouveou ;
E lei tambou,
Per faire ounour,
De tems en tems fasien brusi soun tapagi ;
E lei tambour,
Per faire ounour,
Batien la marcho chascun a soun tour.
Dins un char
Daura de touto part,
Vesias lei Rei moudeste coumo d'angi ;
Dins un char
Daura de touto part,
Vesias briha de riches estendard ;
Ausias d'aubois,
De bellei vois
Que de moun Diou publicavoun lei louangi ;
Ausis d'aubois
De bellei vois
Que disien d'er d'un amirable chois.
Esbahi
D'entendre aco d'aqui,
Me siou rangea per veire l'equipagi ;
Esbahi
De veire aco d'aqui,
De luen en luen leis ai toujour segui ;
L'astre brihant
Qu'ero davan,
Servie de guido, en menant lei tres Rei Magi ;
L'astre brihant
Qu'ero davan,
S'arreste net quant fougue vers l'Enfant
Soun intra
E se soun prousterna,
A douei ginoux, li disien sei priero ;
Soun intra
E se soun prousterna,
Davant lou Rei qu'es nouvelament na ;
Gaspard d'abord
Presento l'or,
E dis : Moun Diou, sias lou soulet Rei de gloiro ;
Gaspard d'abord
Presento l'or,
E dis pertout que ven cassa la Mort.
Per present
Melchior oufre l'encen,
En li disent : Sias lou Diou deis armado ;
Per present
Melchior oufre l'encen ,
Disent : Sias Rei, et sias Diou tout ensen,
La paoureta,
L'umilita,
De vousto amour soun lei provo assegurado ;
La paoureta,
L'umulita
N'empachoun pas vouesto Divinita.
Quant a iou,
N'en plouri, moun bouen Diuo !
En sangloutant vous presenti la mirro ;
Quant a iou,
N'en plouri, moun bouen Diou !
Li dis Balthasard, pu mouart que viou ;
Un jour, per nous
Sus uno crous,
Coumo mourtaou, fenires mouesti miseri ;
Un jour per nous,
Sus uno crous
Deves mourri per lou salut de tous !
Au-jour-d'uei,
Es adoura dei Rei,
E bateja dei man de Jan Batisto ;
Au-jour-d'uei,
Es adoura dei Rei,
Tout l'univers se soumete a sa mei.
Dins un festin,
Rende l'aigo en vin :
Aqueou miracle es segur ben de requisto ;
Dins un festin,
Rende l'aigo en vin :
Nous manifesto soun poude divin

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première version française

 

Trois grands rois,

Modestes tous les trois,

brillaient chacun comme un soleil splendide;

Trois grands rois,

Modestes tous les trois,

Étincelaient sur leurs blancs palefrois.

Le plus savant

Chevauchait devant,

Mais, chaque nuit, une étoile d'or les guide;

Le plus savant

Chevauchait devant;

J'ai vu flotter sa longue barbe au vent.

 

M'approchant,

Je pus entendre un chant

Que, seul, chantait un page à la voix fraîche

M'approchant,

Je pus entendre un chant;

Ah! qu'il était gracieux et touchant!

Où vont les trois

Magnifiques rois ?

Voir un enfant qui naîtra dans une crèche, Où vont les trois

Magnifiques rois ?

Fêter celui qui doit mourir en croix.

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deuxième version française

 

De bon matin, j'ai rencontré le train

De trois grands Rois qui allaient en voyage

De bon matin, j'ai rencontré le train

De trois grands Rois dessus le grand chemin.

 

Venaient d'abord Des gardes du corps,

Des gens armés avec trente petits pages,

Venaient d'abord Des gardes du corps,

Des gens armés dessus leurs justaucorps.

 

Puis sur un char doré de toutes parts,

On voit trois Rois modestes comme des anges,

Puis sur un char doré de toutes parts,

Trois Rois debout parmi les étendards.

 

L'étoile luit Et les Rois conduit

Par longs chemins devant une pauvre étable,

L'étoile luit Et les Rois conduit

Par longs chemins devant l'humble réduit.

 

Au Fils de Dieu qui naquit en ce lieu

Ils viennent tous présenter leurs hommages,

Au Fils de Dieu qui naquit en ce lieu

Ils viennent tous présenter leurs doux vœux.

 

De beaux présents, or, myrrhe et encens,

Ils vont offrir au maître tant aimable,

De beaux présents, or, myrrhe et encens,

Ils vont offrir au bienheureux enfant.

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   La Marcho Di Rei

de Emile de Saint-Auban
extrait du bulletin du Comité de l'Art Chrétien diocèse de Nîmes, année 1895, pages 74 à 76


Paris, 25 décembre 1895.
Ce matin, jour de Noël. j'écris ces lignes - sans doute , hélas !, bien grises à côté du sujet qu'elles traitent, - dans mon cabinet parisien, tout embaumé par la mélancolie d'un temps morose qui suinte et fait la moue.
A chaque phrase qu'elle esquisse, ma plume s'arrête, pour laisser mes yeux se reporter vers une prose soleilleuse qui brille comme un diamant.
Les facettes de cette prose éclairent le papier, déjà un peu jauni, d'un journal provençal, daté du ; Dijòiu, 7 de janvié 1892.,
Elle est signée: Gui de Mount-Pavoun. Elle sourit au bas de la première page, sous un Noël exquis, où vibre mon pays, le pays vif et clair que j'aime. La joie superbe du cantique évoque les détails de la plus étonnante vision :

De matin
Ai rescountra lou trin
De tres grand Rèi qu'anavon en vouiage,
De matin
Ai rescountra lou trin
De tres grand Rèi dessus lou grand camin.

Je les vois, les trois grands mages, parés d'or, parfumés d'encens, portant la myrrhe, et je crois les entendre s'avancer mélodieusement, à travers le lumineux mystère d'une nuit étoilée ! Ils regardent l'astre qui les guide, et déjà ils approchent de Bethléem qui, dans mon imagination, ressemble étrangement à Arles.,... Et voici que mes souvenirs réchauffés entonnent l'air majestueux qui célèbre la marche royale !...
Cet air, quel génie musical l'a conçu et l'a écrit ? Telle est la question que pose et discute l'Aïoli (c'est le nom de mon journal provençal) ? Qu'au a fa la marcho di Rei ?
Ah ! Que de fois, devant un chef-d’œuvre, elle se pose la question : Qu'au la fa ?, . . Souvent, au cours de mon voyage en Allemagne, en face d'un monument, d'un tableau ou d'une statue, je demeurais muet de surprise et d'admiration; j'interrogeais mon catalogue afin d'y trouver l'auteur, et pour tout nom je lisais : Unbekant - Inconnu !...
Unbekant ! Oh! le sublime artiste ! A lui les plus radieuses parmi les merveilles qui constituent le patrimoine immortel de l'humanité pensante et chantante ! Il a fait l'Imitation, il a fait la vierge de Nuremberg, il a fait Nuremberg, la Ville-Poème, il a fait la Mort de Marie du musée de Munich, il a fait les cathédrales, il a fait les solennités, les colères ou les extases du Plain-Chant, il a fait les refrains délicieux, les ondes charmantes, les accents naïfs où vibrent les ardeurs, les courages, la foi de nos pères, il a créé l'atmosphère sonore, picturale et poétique qui rafraîchit notre berceau, qui pleurera sur notre tombe...
Unbekant ! l'inconnu ! la force mystérieuse ! l'anonyme inspiration ! Voilà peut-être les auteurs de la Marcho di Rei 1 Qu'au l'a fa ?..
Il suffirait d'entendre et d'admirer. Mais notre âme n'est pas contente, si notre curiosité n'est pas satisfaite ; et notre esprit, qu'irrite l'énigme, cherche parmi les hypothèses la source de notre admiration, comme l'explorateur cherche parmi les solitudes, la source du peuple lointain.
Qu'au l'a fa ?
Lulli - a-t-on prétendu - pour le triomphe de Turenne. On ne comprend guère - observe avec raison Gui de Mount-Pavoun - que cette Marche de Turenne ait été à ce point ignorée des Parisiens ; car ceux-ci ne la connaissent que depuis que l'Arlésienne de Bizet, dont elle est devenue le principal leitmotiv, la leur a révélée.
Pourquoi ne pas admettre une autre paternité infiniment plus vraisemblable ?
Notre Noël des Rois est signé dans tous les recueils :
Domergue, Decan d'Aramoun.
Quel était ce Domergue, et quand vivait-il ?
M. L. Valla, curé actuel d'Aramon, qui aime à fouiller le passé, à interroger les archives, et à qui les papiers jaunis font de suggestives réponses, a trouvé un acte de décès, lequel pourrait bien s'appliquer à l'auteur de notre Noël :

"L'an que dessus - (1728) -- et le second du mois d'avril, décéda dans la ville d'Avignon messire Joseph-François Domergue, prêtre et curé de cette ville d'Aramon, docteur en sainte Theologie, âgé de trente-sept ans. Son corps fut inhumé dans l'église du vénérable Chapitre de l'église de Saint-Didier de la ville d'Avignon. Signé: Bermond, prêtre.
"

Sur le registre, cet acte de décès est tout enguirlandé de laurier (dessin à la plume), et seul, il est gratifié de ce poétique ornement qui semble rappeler quelque noble conquête de l'art.

M, l'abbé Valla, ayant collationné les actes paroissiaux antérieurs à 1728, a constaté que le premier acte, signé du curé Domergue, est du 28 mars 1724, et que le dernier porte la date du 14 septembre 1727 ; il en conclut que son prédécesseur, à partir de cette époque, dut, sans doute, pour raison de santé, se retirer à Avignon, où il mourut l'année suivante.
De tout cela , il ressort que le Noël des Rois a été composé par le curé Domergue, lorsqu'il était doyen d'Aramon , entre 1724 et 1728.
Pour moi, j'en suis ravi. Vous en saurez la cause, quand je vous aurai dit que je suis presque un enfant d'Aramon, où je vais passer mes automnes. Le génie du curé Domergue chatouille très flatteusement ma fibre patriotique, et je suis charmé que la vue de mes collines, dont j'aime les grisailles transfigurées par le soleil, ait inspiré l'un des thèmes les plus séduisants que j'ai jamais entendus.

Émile de Saint-Auban, 1895.

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Extrait de
Miettes de l'histoire de Provence
de Stéphen d'Arve, 1902.
La Marche des Rois
 
De matin,
Ai rescountra lou trin
De tres grand Rei
Qu'anavon en vouiagi.
 
-oOo-
 
Quel est l'Auteur de l'Œuvre ?
 
Cette fête si provençale, la dernière et la plus solennelle de la métropole qui nous a fourni tant d'intéressants souvenirs, attire chaque année des curieux de tous les points de la région. Elle tarde à se démoder comme tant d'autres traditions de notre chère Provence, et c'est chaque année une agréable et nouvelle surprise.
Nous lui devions une place d'honneur dans ces annales et nous lui avons réservé le dernier chapitre de la première partie de ce volume. Mais avant de poursuivre la description technique et la vraie mise en scène de l'oeuvre, nous avons à ouvrir une large parenthèse pour faire place a une question qui se dresse à chaque anniversaire de cette solennité, sous ce titre provoquant et suggestif :
 
Qui a fait la «Marche des Rois » ?
 
Un vrai tonneau des Danaïdes que cette question, tonneau sans fond dans lequel chaque controversiste apporte en pure perte son seau, toujours absolument vide de sérieux arguments.
Et chaque année depuis bientôt seize ans de la première édition de ce volume ; après de patientes recherches sur les objections diverses présentées, je n'ai éprouvé nul besoin de changer d'avis sur ma première opinion, si simple, si naturellement vraie.
Le curé doyen d'Aramon, Domergue, est-il l'auteur des paroles du célèbre Noël qui sert d'épigraphe à ce chapitre et de texte à la Marche des Rois ?
- Oui, incontestablement.
- Peut-on lui attribuer la musique aussi ?
- Non, trois fois non ; car Domergue n'était pas plus musicien que le menuisier Peyrol, que Puech et d'autres qui ont adapté des Noëls par eux composés sur des airs connus, anciens ou nouveaux. Domergue n'a pas une ligne dans le grand dictionnaire des musiciens de Fétis, pas plus d'ailleurs que dans Larousse comme poète ; et le digne homme vous le dit lui-même en écrivant tout simplement en tête de son oeuvre : « Air de la Marche de Turenne », car, c'est incontestablement une marche, une marche militaire bien caractérisée ; vous n'avez qu'à vous en assurer en faisant siffler devant vous l'air sur un fifre et en scandant les mesures sur un ou plusieurs tambours.
Il n'y a que deux phrases dans l'air , et ce qui prouve encore mieux que l'air existait avant la confection du poème, c'est la difficulté qu'a éprouvé l'auteur de plaquer les paroles sur la seconde phrase où elles doivent être légèrement contorsionnées par le débit.
Le curé Domergue mourut en 1728, quarante ans après Lulli, l'auteur prétendu de la Marche de Turenne. Et nous ne voulons rien affirmer sur ce point qui doit, pour un moment, être éloigné du débat; mais le poète connaissait évidemment l'air de cette marche, puisqu'il indique que c'est sur cet air qu'il faut chanter sa composition.
Les éditeurs, qui imprimèrent dix, quinze ou vingt ans après sa mort, des recueils de Noëls, Séguin, Aubanel à Avignon, Pontier à Aix, Mossy à Marseille, répètent tous l'indication « air de la Marche de Turenne », aucun n'en publie la musique; l'air était donc bien connu, il suffisait de l'indiquer.
Et comment le poète connaissait-il cet air au fond d'un village du Comtat ?
Pourquoi n'aurait-il pas été rapporté par un des soldats de l'armée de Turenne, où nombre de Provençaux avaient été enrôlés pendant les campagnes du Roussillon et des Cévennes ? Demandez plutôt au petit pâtre que vous rencontrerez dans une excursion sur les cimes alpestres, en l'entendant siffler la marche bien célèbre aussi dans sa banalité de la Casquette au père Bugeaud, s'il connaît l'auteur des paroles et de la musique et qui lui a appris cet air ?
Et dans un siècle ou deux, si les tambours de nos régiments ont cessé de battre cette marche ou ce pas accéléré, si on retrouve dans un vieux recueil de chansons sur lequel nos petits-neveux puissent lire : Air de « As-tu eu ! la casquette ! la casquette ! » les mêmes dissertations ne pourront-elles pas se produire ?
M. Henri Maréchal, inspecteur du Conservatoire, auteur de l'opéra de l'Opéra Calendal, a déclaré à Mistral qui le consultait à ce sujet, n'avoir rien trouvé dans la bibliothèqûe du Conservatoire et ne voit dans l'indication de l'air que la fantaisie d'un auteur désireux de donner un titre ronflant à son œuvre, et il ajoute que le cas est fréquent dans les airs populaires. Mais Mistral ne s'est pas déclaré convaincu avec cette déduction par trop hardiment spécieuse.
Castil-Blaze, un bien érudit chercheur, n'hésite pas à attribuer l'air à Lulli ; on ne prête qu'aux riches : Nous serons moins affirmatif et sans avoir la preuve que le musicien génial, qui dirigeait à la cour de Louis XlV le groupe des petits violons du roi, ait composé cette marche et qu'elle ait précédé le cortège du grand capitaine dans sa rentrée à Paris plus ou moins solennelle ; ce qui ne résulte d'ailleurs d'aucune chronique de l'époque, nous ne nous refusons pas à admettre que cet air fut un de ceux adoptés par la musique régimentaire du grand capitaine, orchestre très simplifié de fifres et de tambours pour l'infanterie, les trompettes, alors comme aujourd'hui, étant déjà l'apanage exclusif de la cavalerie.
Mais pourquoi cet air ne se trouve-t-il pas dans les archives du Conservatoire ? ce qui étonne spécialement M. Maréchal.
Avant de démontrer la simplicité presque banale de ce déficit dans les dites archives, nous trouvons une aussi simple explication de la trouvaille du curé d'Aramon qui n'était pas musicien, nous en fournirons bientôt une nouvelle preuve.
Le bon curé n'avait-il pas pu entendre chanter ou siffler le dit air par un des soldats de l'armée de Turenne, de retour dans ses foyers à Aramon ? un des fifres ou un des tambours du régiment qui avait cette marche dans son répertoire ?
M. Laforgue, avocat marseillais, qui a, comme tant d'autres, apporté son seau à ce tonneau des Danaïdes, dit qu'il ne faut point demander à Paris des documents sur la matière et voudrait que le dit air fut provençal.
M. Cargier de Lourmarin voudrait qu'on dirigea les investigations vers la ville d'Aix, soit aux archives de la maitrise, soit à la bibliothèque Méjanes; nous lui réservons une réponse stupéfiante.
M. Vincent, membre érudit de l'Académie de Marseille, qui a repris naguère la même thèse, réserve toute opinion contradictoire et se borne â désirer qu'un fureteur patient puisse établir d'une façon certaine l'état civil de la vénérable marche et bien mériter ainsi de l'art provençal.
 
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Devant cette question lancinante par sa persévérance chronique, ce point d'interrogation spectral, j'ai repris, avec ma lanterne, le chemin de la mine et recommencé les fouilles en appelant, à mon aide le très dévoué maitre de chapelle, organiste de la métropole de Saint-Sauveur.
Après avoir écouté avec un bienveillant intérêt la lecture des pages qui précédent, le maëstro a trés énergiquement formulé les affirmations suivantes :
« Vous ètes absolument dans le vrai, ce n'est pas l'auteur des paroles qui a fait l'air. Cet air a cela de particulier qu'il est écrit dans le mode mineur bien qu'il présente un caractère majestueux et triomphal que n'a pas ordinairement ce mode. II est donc plus que probable qu'il a eu pour auteur un maitre de l'art comme l'était le surintendant de la musique du roi.
Saboly était certainement aussi capable de concevoir cette remarquable inspiration; mais comment supposer que le régiment de Turenne eût emprunté la dite marche à un de ses Noêls ? J'aime mieux croire que le bon curé d'Aramon, après avoir composé son Noël, ait emprunté cet air de marche se prétant à sa poétique composition.
La généalogie de la première exécution à grand orchestre, à la métropole est difficile à établir. L'organiste Supriès l'a­t-il inaugurée avant la Révolution et la tenait-il de ses prédécesseurs Pellegrin ou Delpadré, dont les noms sont restés dans une très nébuleuse tradition ? C'est probable et mème à peu près certain bien qu'aucun document d'archives ne le consacre. Ce qui est plus certain, c'est qu'il n'y a jamais eu comme partition connue que celle que Charbonnier avouait avoir reconstituée de souvenir en modifiant l'orchestration au fur et à mesure de l'introduction d'instruments modernes, les pistons, les saxhorns, les ophicléides remplaçant tour à tour les clarinettes, les cors et autres instruments démodés. J'ai dû en faire autant moi-même, quand je recueillis la succession de Charbonnier qui emportait dans sa retraite prématurée toute la partition orchestrée.
Il est inutile de raconter les raisons d'ordre intime qui avaient donné naissance a cette ombrageuse, susceptibilité de Charbonnier qui survécut huit ans à sa mise à la retraite ou sa démission prématurée, mais un fait bien curieux que je n'ai jamais raconté se produisit a la mort de mon prédécesseur.
J'avais quelque droit d'espérer que les partitions seraient léguées à la maîtrise. Il n'en fut rien. C'est une vieille soeur de l'organiste qui recueillit cet héritage et le conservait jalousement, peut-être par ordre.
L'héritière mourait à son tour et vous allez voir s'il n'y a pas une Providence pour les déshérités ».
A ces mots, le bon maëstro se lève radieux, tire le rideau vert d'une bibliothèque et dépose sons mes yeux un dossier bourré de cahiers de musique sur lesquels je pouvais lire Marche des Rois.
« Voilà, me dit-il, les manuscrits authentiques, si vous connaissez la calligraphie de Charbonnier, et vous allez savoir comment ils sont arrivés dans mes mains : Je traversais, il y a environ quinze ans, je puis préciser, la place des Précheurs un jour de marché, je vis émerger d'un lot de ferrailles quelques feuilles de papier noté, je soulève le premier feuillet du bout de ma canne et je lis ce que vous pouvez voir. Je demande au brocanteur le prix du paquet. Vingt sous, si vous voulez ? Je m'empressai de vouloir sans marchander et j'emportai triomphant, mais en dissimulant ma joie, le manuscrit authentique.
Le trésor que deux défunts dont j'étais moralement l'héritier naturel le plus direct m'avaient refusé, je le ramassais pour vingt sous sur un trottoir. »
- Très curieuse votre histoire, cher maëstro ! Vous me permettez de la raconter ?
- Pourquoi pas ?
- Merci ! C'est. un sérieux argument pour prouver, à MM. Maréchal, Wekerlin et leurs congénères, pourquoi tous les précieux manuscrits de musique ne vont pas à la bibliothèque du Conservatoire.
Habent sua fata libelli !
 
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L'Exécution de la Marche des Rois
 
Il est temps de reprendre la description technique.
L'immense vaisseau de la métropole et ce que nous pourrions justement appeler ses dépendances, car les nefs latérales sont entièrement isolées de la principale, offriraient trois fois plus d'espace, quelles seraient encore bondées de curieux auditeurs aux vêpres de la fête de l'Epiphanie.
Nous disons auditeurs, car il n'y a ici qu'a entendre et nombre de retardataires, forcément accumulés dans le fond d'une nef latérale, nous ont affirmé que les grandioses effets de cette orchestration puissante offraient encore plus d'illusion dans le fond de ces nefs où se tasse la foule avide, jamais rassasiée de l'imposant effet du Noël auquel une marche guerriére a servi de thème musical.
L'ingénieux adaptateur des paroles du Noël sur cet air martial ne se doutait pas certainement de l'énorme effet que pourrait produire à plus d'un siècle et demi de distance, l'air qu'il avait choisi pour chanter sa poésie presque banale de simplicité.
Cette exécution a toujours été le triomphe des divers organistes de Saint-Sauveur, bien que l'adjonction d'une orchestration puissante double ses effets. Les instruments à cordes qui, dans le principe, appuyaient seuls les sonorités bruyantes des bugles d'étain mis en jeu par les pédales de l'orgue, ont été renforcés et même presque entièrement remplacés par les instruments de cuivre, cors, saxhorns et cornets. Nos petits-neveux verront peut-être introduire les trompettes célébres de la marche d'Aïda.
Après le chant du Magnificat dont les versets sont rythmés sur autant d'airs de Noëls, comme nous l'avons déjà dit dans un précédent chapitre, l'orgue prélude par un pianissimo savamment gradué dans les premières mesures aux plus douces transitions qui laissent percer, à certains passages, les langoureuses passades d'une pavane Pompadour, conduisant graduellement à un crescendo furioso, transformant en crépi­tations de mitrailleuses les suaves accents des premières notes.
Cette marche savamment orchestrée donne, dans sa graduation, l'illusion d'un lointain cortège qui s'avance et l'effet en est si réel qu'il n'est pas rare d'entendre des mères dire à leurs petits enfants dans le naïf et suave idiome de Provence ; « Ecoute bien comme ils approchent, ils ont dépassé la colline de Saint-Eutrope, Ici raqui ! Les voilà ! qui passent la porte Notre- Dame, et nombre de tètes enfantines se tournent vers la porte de la grande nef, au moment où le crescendo de la marche royale a atteint son maximum d'intensité, pour voir entrer le cortège imaginaire, mais l'effet d'illusion est réellement atteint.
L'entrée et l'arrivée des rois â l'étable de Bethléem est souligné par les retentissements tonitruants de la grosse caisse et des cymbales, et le symbolisme catholique ajoute un effet de plus à cette station royale devant le Roi des rois.
L'astre qui a conduit la caravane du fond de l'Orient doit s'arrêter, d'après la tradition évangélique, sur l'humble logis de la crèche, et au même instant on voit flamboyer sur le maitre-autel de la métropole une gigantesque étoile, dont une trainée de mèche fulminante enflamme immédiatement tous les rayons.
Cette fantastique improvisation est un peu renouvelée des fêtes chinoises et vénitiennes, mais l'à-propos de l'imitation nous permet une très louangeuse approbation.
 
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C'est le moment choisi par l'organiste pour jouer la divine aubade sur un air très sautillant dont le registre, flûte et galoubet fournit les principales notes. Il est naturellement accompagné par le tambourin.
Un beau choeur d'hommes entonne ensuite le thème d'adoration, un christus natus est, aussi magistralement orchestré qu'un oratorio d'Haydn.
Ce morceau est de Supriés.
 
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A propos de l'aubade et de son accompagnement par l'instrument typique si vraiment provençal, on se prend à regretter qu'une véritable escouade de tambourins ne succède pas à la bruyante orchestration de la Marche des Rois. tandis qu'on entend à peine bourdonner l'unique caisse vibrante que tient toujours entre ses jambes, comme un pauvre honteux, l'unique tambourineur dédaignant la pose plastique.
Y a-t-il jamais eu plus d'un tambourin ? La tradition est muette à ce sujet, mais il y avait en revanche un bien plus grand nombre de tambours et trompettes. L'organiste Poncet nous dit avoir conservé à ce sujet un racontar du sacristain Chavignot, l'homme aux traditions, affirmant qu'avant la Révolution, on réunissait ce jour-là les deux tribunes par une charpente ou large jubé, au centre duquel se plaçait le chef d'orchestre avec une rangée de bachas de Peyrolles et de Jouques, tapant à tour de bras sur cette espèce de tambour ayant une dimension double de celle du tambourin, mais sans vibrations, rendant l'effet du coup de canon à distance.
Vous devions un rappel à cette tradition. Un trouvera quelques détails de plus sur cet instrument, aujourd'hui déclassé, dans le chapitre spécial « Monographie du tambourin » à la seconde partie du volume.
"
Après la royale aubade et le chant du mollet d'adoration, la caravane des Mages se remet en marche et c'est du decrescendo rinforzado qu'elle redescend aux premières mesures du motif, s'éteignant dans le lointain jusqu'à ce qu'elle disparaisse (pour continuer la populaire et si expressive figure) derrière la colline de Saint-Eutrope.
Nous avons voulu pointer scrupuleusement le nombre de la reproduction des deux phrases de la Marche par l'orgue seul d'abord, et par tout l'orchestre ensuite. Elle est répétée neuf fois en crescendo avant l'aubade, et huit fois en decrescendo après l'aubade, soit en tout dix-sept fois et le changement de ton et de registre n'engendre aucune monotonie pendant la demi-heure prise par l'exécution.
 
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« Elle est très imposante votre solennité de la Marche des Rois dans votre métropole d'Aix. «
Cette appréciation est d'un humoriste respectueux de toutes les traditions qu'il avait d'ailleurs mission de rechercher ; l'éminent littérateur Francis Wey, qui fut pendant trente ans président de la Société des Gens de Lettres, et plus tard inspecteur des archives de France.
Francis Wey avait été amené à Aix dans une de ses tournées d'inspection à l'époque de la fête des Rois.
En causant un jour, à Chamonix en face du Mont-Blanc qu'il venait décrire, de nos traditions provençales, il me rappelait ce souvenir ; me disant avoir trouvé dans cette exécution grandiose des impressions aussi saisissantes que celles que lui avait fait éprouver l'audition de la marche de Sémiramis.
« Rossini, ajoutait-il, aurait pu s'en inspirer. »
Et Francis Wey n'était pas, certes, un enthousiaste; c'était plutôt un blasé.
 
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Ce thème musical a d'ailleurs tenté plusieurs maitres ; si Rossini ne l'a pas connu pour s'en inspirer. Nous en retrou­vons mieux que des souvenirs dans un passage de Gillette de Narbonne d'Audran, et il est tout entier, mais fort peu heureusement transposé, dans l'Arlésienne de Bizet.
La Société des Concerts classiques de Marseille, qui vint dans le courant de décembre 1883 offrir une soirée harmo­nique aux habitants d'Aix, crut flatter leurs intincts patrio­tiques en mettant à son programme la Marche des Rois ; mais le thème transposé en majeur ne rendit point l'effet attendu et valut au chef d'orchestre un superbe mouvement d'indignation d'un de nos concitoyens, M. de La Calade, conseiller à la Cour, prématurément retraité, mais resté un savant mélomane en activité jusqu'à sa mort toute récente.
M. de La Calade assignait aux assises de l'orchestre de Saint-Sauveur, le jour des Rois, pour le remettre dans le ton, le chef d'orchestre des Concerts marseillais qui avait ainsi démarqué le linge de Lulli.
Paix à Bizet, il est mort, hélas trop jeune, pour avoir eu le temps de se repentir. Paix au grand organiste Charbonnier qui eût été certainement frappé d'apoplexie, si le supplice de la transfiguration bâtarde de sa belle orchestration lui avait été imposé.
 
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Une drôlatique et non moins authentique anecdote doit trouver très naturellement sa place ici, comme gai corollaire de ce long chapitre consacré à la Marche des Rois.
Cette musique imposante avait fait une telle impression sur un bon curé de village pendant ses années de Séminaire, qu'il voulut se donner le luxe d'une reproduction dans une messe à grand orchestre le jour de la fête patronale de sa paroisse, la Saint-Eloi.
Le village de Mimet, pittoresquement assis sur les plus hauts contreforts de la colline de Notre-Dame des Anges, sépare le diocèse d'Aix de celui de Marseille. Cette paroisse, une des plus infimes du diocèse d'Aix, comptait à peine 300 âmes à l'époque de notre histoire.
L'abbé Massé, un des premiers prêtres ordonnés après le Concordat était le curé de ce village. Très digne prêtre, mais d'une simplicité monumentale (elle est restée légendaire), s'imagina qu'il n'y avait qu'à se procurer des instruments pour former un orchestre.
Il partit pour Marseille et s'en fut décrocher chez les fripiers de la rue Belzunce, tout ce qu'il trouva de violons fëlés, de trompettes bosselées, de clarinettes enrhumées, et ajoutant au stock une grosse caisse et des cymbales, il arriva avec sa charrette chargée de ce matériel lyrique (??) et s'empressa de convoquer ses paroissiens auxquels il tint ce langage:
« Anan veiré, meis enfants, se pouren pas coumo à San-Sauvaire fairé péta dé bello musiquo ! »
- Nous allons voir, mes enfants, si nous ne pourrons pas. tout comme à Saint-Sauveur, faire éclater de la belle musique !
Il distribue les rôles. Les partitions n'avaient rien à voir dans l'affaire ; les exécutants improvisés apprennent tant bien que mal à râcler sur les cordes, à souffler dans les cuivres, à taper sur les peaux, et l'abbé ravi de ce bruit, qu'il essayait de régler en battant la mesure, fait ranger son orchestre dans le choeur le jour de Saint-Eloi, pour la cérémonie de la bénédiction des bestiaux.
Après le Credo, avant l'Offertoire, il se retourne et étendant les bras il lance le solennel aro ! ! « à présent ! »
Les grincements, les émissions stridentes des trompettes, les vibrations des cymbales font trembler les voûtes de la petite église, et ce qu'on n'avait pas prévu, les animaux rassemblés devant le porche, effarouchés par ce vacarme infernal, le doublent par des beuglements, des bêlements et des grognements indescriptibles ; les femmes prennent peur et se sauvent. La prétendue messe en musique se termina par une effroyable déroute.
Le curé ne se tint pas pour battu et se contentait de dire :
« L'y avié tro d'instrument per lou veisseou qu'es pas tant grand que San-Sauvairo. »
- Il y avait un peu trop de musiciens(??) pour la capacité du vaisseau qui est moins grand que Saint-Sauveur.
 
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Ce n'est là qu'une des cent et une histoires de curé Massé, il y en a de non moins curieuses.
Ce brave homme est mort il y a cinquante ans, dans une petite maison du cours Sainte-Anne, à Aix, laissant à ses héritiers un pauvre vieil âne dont il n'avait jamais voulu se séparer (touchante sympathie !), et qu'il avait trouvé le moyen de nourrir avec des sarments; cette dernière affirmation nous semble moins authentique.
 
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Le mot célèbre du curé de Mimet organisant uneprocession composée de trois personnes présentes, et qui réglait ainsi la marche du cortège :
« La croix passera seule en tête, le clergé après et les fidèles suivront en foule. »
Ce mot n'est pas de lui mais d'un de ses prédécesseurs avant la Révolution, car on parlait déjà â cette époque de la procession de Mimet, un village qui avait alors 80 habitants.
 
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Une dernière et toujours dans le même cadre, celui des rois Mages.
On prête encore â un curé de Mimet le sermon suivant le jour de la fête des Rois.
« Vous savez, mes frères, que nous célébrons aujourd'hui la fête de sainte Epiphanie, qui était la mère des trois rois. Il y en avait deux de blancs comme nous, mais le troisième était noir (Mourou). Il parait qu'elle s'était frappée pendant sa grossesse de la vue d'un nègre qu'elle avait rencontré. Ah ! les saintes ont le droit de se frapper comme tout le monde ! »
L'inventeur de cette histoire qui l'a prétée si gratuitement au curé de Mimet, on ne prête qu'aux riches, était certainement un spirituel original.
 
Extrait de « Miettes de l'histoire de Provence »
de Stéphen d'Arve, 1902.
Documentation Philippe Ritter - Edition NEMAUSENSIS.COM - Décembre 2007
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