LA
LÉGENDE DU LIÈVRE DU PONT-DU-GARD.
de A. Artozoul, 1898 Le lièvre du Pont du Gard Sous
ce titre, la revue Nemausa
a publié dans son numéro de mars 1883 la légende
que ce colossal monument a fait naitre dans l'imagination
populaire. C'est à M. Maruéjol que revient l'honneur
d'avoir recueilli et conservé ce récit dont nous
reproduisons littéralement l'extrait suivant :
Une
belle et gracieuse jeune fille, dont le père est un grand
personnage de la ville de Nîmes, est aimée d'un beau et
riche jeune homme. La belle soumet son amoureux à plus d'une
épreuve avant de consentir à l'épouser. La
dernière consiste à conduire à Nîmes, pour
les réunir à celles de la fontaine, les eaux de la
source d'Eure, près d'Uzès : « Fais
ce prodige, lui dit-elle, et je jure de le donner ma main.
»
Le
coeur gonflé de joie et d'espérance, le jeune homme se
met à l'oeuvre ; il rassemble tous les ouvriers d'alentour, et
en rien de temps un immense canal serpente à travers les monts
et les vallées l'Uzès à Nîmes. Mais il
reste encore à faire le plus difficile de cette oeuvre
gigantesque : il manque le pont qui doit porter le canal d'une
montagne à l'autre par-dessus le Gardon. Les ouvriers
redoublent d'ardeur. À grands coups de pioches et de marteaux,
ils arrachent au flanc des collines d'énormes quartiers de
roche et les roulent dans la rivière ; mais à peine les
piles émergent-elles de l'eau qu'une crue survient à
l'improviste et emporte tout. Vingt fois engloutie dans les remous
écumants, vingt fois reprise, l'oeuvre s'élevait enfin,
majestueuse et forte, défiant la rage de la rivière,
lorsqu'un épouvantable ouragan s'engouffre dans la vallée
et disperse au loin, comme des feuilles légères,
les grandes pierres amoncelées.
Alors,
le découragement se mit au coeur des ouvriers, et, pour la
première fois, l'amoureux de la belle Nîmoise se prit à
douter du succès de son entreprise. Mais un étranger
qui passait par là, leur dit : « Eh
! bonnes gens, pourquoi vous donner tant de peine ? Si vous voulez,
je vais vous construire votre pont ; mais à une condition,
c'est que le premier individu qui y passera m'appartiendra.
»
Les ouvriers reconnurent par là qu'ils avaient affaire au
diable ; mais, se disaient-ils entre eux, c'est au demeurant un
diable fort honnête, puisqu'il ne nous demande qu'un seul
individu, alors qu'il lui serait si facile d'en prendre
plusieurs sans consulter personne. Et le marché fut conclu. Le
pont s'éleva par enchantement et étala bientôt
ses trois rangées d'arcades inébranlables jetées
comme un immense filet de pierre à travers la vallée.
Mais
personne, cela va sans dire, ne voulait passer le premier.
«
Laissez-moi faire, dit l'amoureux de la belle Nîmoise, et vous
allez voir comment on trompe le diable. »
Puis il prit un chat et s'en fut le lâcher à l'une des
extrémités du nouvel édifice. La pauvre bête
effrayée traversa le pont en courant et tomba entre les
griffes du diable, qui, blotti à l'autre extrémité,
attendait sa proie avec impatience. Qui fut bien attrapé ? Le
diable qui ne trouva qu'un chat pour tout salaire, au lieu d'un homme
sur lequel il comptait.
Enfin,
le pont était construit, le canal aussi, et l'amoureux de la
belle Nîmoise se disait tout bas, en retournant à Nîmes,
que dans quelques instants, il ne manquerait plus rien à son
bonheur. Mais, hélas! il ne fut pas récompensé
de tant d'efforts surhumains, de tant de constance et d'amour, et dès
que les eaux de la fontaine d'Eure commencèrent â couler
sur un des coteaux de Nîmes, la belle Nîmoise s'enferma
dans un couvent.
D'après
une variante de la légende, l'animal làché à
l'entrée du pont était non un chat, mais un lièvre
que le diable saisit au passage et lança de dépit
violemment contre l'édifice, où il aurait laissé,
dit-on, une empreinte. Cette prétendue image du lièvre
n'est autre que le phallus décrit dans certains manuels.
-oOo- Extrait de "Une Visite à Nîmes" description de ses monuments antiques de J. F. A. Perrot, 1846 Emplacement du Lièvre/Phallus sur le monument Je ne dois point oublier de faire ici mention d'une figure de Phallus qu'on trouve sculptée en bas-relief sur ce bâtiment, et que plusieurs ont prise, sans fondement, pour celle d'un lièvre. Il est du côté de l'orient, sculpté sur un des voussoirs de la troisième arche du second pont, entre les retombées ; il a une sonnette au cou, et est terminé par trois queues retroussées qui forment trois autres Phallus, mais plus petits que le précédent. Ce sont encore ici des symboles de la population et de l'éclat que devait avoir, un jour, la colonie de Nismes. -oOo- En savoir plus sur les moeurs et légendes du pays Nîmois > Les origines du 25 décembre, la Noël de l'église Romaine> Les moeurs à Nîmes dans l'ancien temps > L'époque antique et la Déesse Maïa > L'abolition de la fête des fous à Nîmes en 1384 > Carnaval, Cavalcade et Fête de Charité à Nîmes > Etablissement d'une maison d'un avocat des pauvres à Nîmes en 1460 > Les filles de débauche, l'abesse et les maisons de tolérance au XVIe siècle à Nimes > La Tradition des jeux du papegaï à Nîmes et sa fin en 1660 > Création du premier jeu de Mail à Nîmes en 1637 > La Légende du lièvre ou Phallus du Pont du Gard. > Origine des spectacles taurins à Nîmes et dans le Gard > Contact Webmaster. |