Les 13, 14 et 16 février 1904, la Fête de Charité se déroula durant la période du mardi Gras.
Sa Majesté CARNAVAL 1er présida ainsi aux nombreuses Festivités qui bénéficièrent de la clémence de la pluie, les averses ayant eu le bon goût de s'arrêter pour les sorties des Chars, reprenant à la fin des défilés ! Sa Majesté savait se faire respecter, fort heureusement.
Comme précédemment, les chantiers furent improvisés sous les voûtes des Ponts où s'activèrent tous les corps de métiers pour l'édification des Chars.
Les progrès techniques qui avaient eu lieu en 10 ans donnaient un air bien différent á cette Fête qui avait toujours comme objectif de venir en aide aux déshérités de la Cité.
Le programme des festivités sur trois jours se déroula ainsi :
 
- Le SAMEDI 13 Février
- A 9 Heures du soir:
ARRIVEE et RECEPTION de sa MAJESTE CARNAVAL Ier éclairé à l'électricité.
Grande retraite aux flambeaux avec le concours des Musiques militaires de l'école d'Artillerie et du 40éme d'Infanterie, de celles des Sapeurs-Pompiers et de plusieurs sociétés musicales.
 
Le DIMANCHE 14 Février
- A partir de 12 H 30:
GRANDE CAVALCADE avec les plus GRANDS CHARS, des VOITURES DECOREES tractées par des chevaux et des automobiles, á cheval-vapeur, toujours accompagnées de groupes de Cavaliers et de piétons.
L'itinéraire était aussi plus ramassé sur le centre :
Gare des voyageurs, Avenue Feuchères, Bosquet de l'Esplanade, Bd de l'Esplanade oú officiait le Jury face au Palais de Justice, Square de la Couronne, Boulevards Amiral-Courbet, Gambetta, Square Antonin, Alphonse Daudet, Victor Hugô, des Arènes, de l'Esplanade en deuxième passage, retour á Feuchères en passant devant Ste Perpétue.
- Le soir à 10 heures :
Grand Bal paré, masqué et travesti au Grand Théâtre suivi à 11 h et demi d'un Grand CAKE-WALK réglé par Mademoiselle TOGNOLI, Maîtresse de ballet au Grand Théâtre et dansé par les Dames du Corps de Ballet et des Membres du Comité d'organisation.
CONCOURS de CAKE-WALKERS !
- A 1 h et demie du matin :
GRAND DEFILE CARNAVALESQUE suivi de la remise des Bannières et marottes aux masques les plus réussis.
La musique militaire clos le défilé qui se poursuit par une bataille monstre de fleurs et de confetti. Le Boulevard Victor Hugo fut le théâtre d'une intense bataille, á tel point que la couche de confetti atteignait le haut des trottoirs, plus de 13 cm de petits ronds multicolores !
- A partir de 10h, BAL travesti, une Bataille de Fleurs à l'EDEN-CONCERT.
 
LE MARDI GRAS 16 FEVRIER
- A partir de 15 Heures reprise du GRAND CORSO et défilé des CHARS et GROUPES au complet, avec remise des Prix et des Bannières au passage devant le Jury.
- A partir de 20h, reprise des bals. Plusieurs chars emportèrent l'adhésion totale des spectateurs :
- LE CHAR DE L'ENFANCE représentait une vache nourricière aux énormes mamelles, coiffée d'un bonnet blanc aux larges rubans flottants. Toute la famille de sa Majesté CARNAVAL, accroupie sous le ventre de la nourrice, prenait une abondante nourriture aux mamelles généreuses.
- LE CHAR DU 38éme d'ARTILLERIE reproduisait un merveilleux CHATEAU-FORT du Moyen-âge aux élégantes tourelles, avec un pont-levis mobile.
- LE CHAR DE LA VIGNE dédié á un magnifique et imposant BACCHUS, avec d'énormes bacchantes, le tout croulant sous des grappes de raisins trop grosses pour une bouche.
Les groupes ne furent pas en reste, l'on distingua, en particulier :
- LE CHAR DE LA VILLE avec un énorme crocodile en carton-pâte, réalisé d’après la maquette de Charles Adolphe Ritter. (cette dernière ayant été réalisée en 1889 représentait la ville de Nîmes à l’exposition universelle de Paris) . A l'intérieur en proue, une représentation humaine de la ville de Nîmes (statufiée par Pradier sur la fontaine de l'Esplanade en 1850), et la musique des Sapeurs-Pompiers.
- Les MARECHAUX de l'EMPIRE, des PHENICIENS, les TROMPETTES de la RENAISSANCE, des PECHEURS NAPOLITAINS, des TOUAREGS plus vrais que nature, etc.
A signaler que le COMITE d'organisation demanda à tous les Chefs d'entreprise et de Maisons de Commerce de donner congé à leur personnel, le Mardi-Gras à partir de 11 H. du matin pour leur permettre de participer au cortège ou d'assister au défilé. La foule fut considérable, de nombreux spectateurs venaient de l'extérieur: la Sté du P.L.M. annonça 57 trains spéciaux et la Compagnie de la Camargue plusieurs trains en supplément pour répondre à l'affluence.
 

Les 10, 11 et 12 février 1907, avec cette Cavalcade, sa Majesté Carnaval prendra la suite des fêtes de charité de 1877, 1894 et 1904.
Il faut savoir que depuis 1904, la Fête de Charité se déroulait sur 3 jours, dimanche, lundi et Mardi-Gras. Ces fêtes réalisées en plein air au mois février étaient un pari risqué, en effet contrairement à Nice ce mois-là est souvent le plus rigoureux de l’hiver, mais comme par miracle le beau temps sera aussi de la fête.
La semaine précédente, la météo n’était pas de la fête, une tempête s’abattit sur la région et provoquât de nombreux dégâts.
De nombreux organismes participèrent à cette cavalcade - Les militaires avec leurs fanfares et leurs chars - Le char de la morue à la brandade (Raymond) - Le char de la société de Gymnastique - Le char du Trésor - Les Sapeurs-Pompiers avec un énorme Éléphant en carton-pâte, réalisé par Charles Adolphe Ritter. - Le Char Raphaël (maison Horvilleur) - Le char Rabelais (Cataclets) - Le char des travailleurs Français - Le char de Carnaval.
Le premier prix sera donné à la musique des Sapeur-pompiers de Nîmes avec leur fabuleux Éléphant, ce sera un vase de Sèvres offert par le Président de la République. Le 1er second prix de 800 frs sera  attribué au char Rabelais. Le char des travailleurs Français obtiendra le 2ème second prix de 600 frs.
 
Cartes postales anciennes collection Jean-Pierre Descout, Philippe Ritter et Georges Mathon.
Texte extrait (et enrichi par Philippe Ritter) de "La Cavalcade des Pauvres" de Georges Casella et Jacques Guenard - Edition Lacour, 1994
 

Un peu d’histoire sur lee origines du  Carnaval à Nîmes, avec cet extrait de « Mœurs et Traditions de Nîmes aux temps anciens » par Jean-César Vincens et Baumes, 1790.
Nous ne parlerons pas de ces temps d'ignorance pen­dant lesquels un esprit de superstition, presque également étendu sur toutes les classes des citoyens, faisoit multiplier les donations aux églises et les aumônes aux mendians. La splendeur de l'état monastique, le dérèglement des moeurs parmi les personnes consacrées à la religion, et cette commisération mal-entendue qui multiplie les pauvres en entretenant leur paresse. tirèrent leur source de ces legs que la piété faisoit au préjudice même de la na­ture. Nous passerons encore sous silence ce zèle indécent, cette excessive ardeur que les Nismois témoignoient pour faire charivari, toutes les fois qu'une personne veuve contractoit de secondes noces. Cet usage, porté trop loin, fut prohibé par Charles V en 1373 ; il s'est conservé néanmoins parmi le bas peuple, par l'indulgence de la police. Nous ne dirons rien non plus de la passion des gens de Nismes pour les mascarades dans les jours de car­naval ou à l'occasion de la fête de Noël. Ces travestisse­mens, devenus un prétexte pour commettre une infinité de désordres et de violences, ne pouvoient qu'être défendus. Ceux que le carnaval avoit fait autoriser furent prohibés, en 1545, par la cour royale ordinaire de Nismes. Cepen­dant on voit encore aujourd'hui les traces de cette prati­que, à laquelle on ne s'oppose plus parce qu'on n'y trouve pas les abus qui l'avoient fait exclure d'une ville policée.