Les Anciennes Fortifications

de Nîmes

M. Igolen, 1935.

 

 

 

V

Les remparts du Moyen-Age, XIle et Xllle siècles.

 

Vers la fin du Xe siècle, quand Nîmes commença à se relever des ruines accumulées sur elle depuis la décadence romaine, le besoin d'entourer la ville de nouveaux remparts se fit sentir pour en assurer la garde et la défense.

 

Nous n'avons pas de renseignements bien précis et s'enchaînant les uns aux autres sur la construction de ces remparts, mais seulement des constatations, des faits, par çi par là qui permettent cependant de suivre le processus des travaux accomplis.

 

Comme précédemment, l'Histoire du Château des Arènes de M. Mazauric nous sera d'un grand secours pour la rédaction de ce chapitre et volontiers nous y ferons appel pour suivre la genèse des nouvelles fortifications des Xlle et XIIIe siècles.

 

La construction des nouveaux remparts commencée, sans doute au début du XIe siècle, se poursuivit durant tout le siècle suivant, vers la fin du XIIe siècle, on acheva l'enceinte en englobant à l'intérieur de celle-ci le Château des Arènes, vers 1360, la construction de la Tour Vinatière et son raccordement aux remparts voisins marquèrent les derniers travaux de l'enceinte qui nous fut conservée jusqu'à la Révolution de 1789.

 

La nouvelle enceinte comprenait

 

1 - à l'ouest de la ville, des remparts s'arrêtant près des Arènes au sud, doublant la défense précaire qu'offrait le fossé du Champ de Mars qui recevait une partie des eaux de 1a Fontaine.

 

2 - au nord, des remparts établis au bas des collines qui entourent Nîmes de ce côté et sur lesquelles se développait jadis le mur romain.

 

3 - à l'est, de nouveaux remparts, de l'ancienne Porte d'Arles au voisinage des Arènes, furent établis sur l'emplacement même des anciens murs romains, pour utiliser tout ce qui restait encore de ceux-ci, particulièrement les bases des vieilles tours, encore nombreuses et solides, et la petite forteresse de l'ancienne Porte d'Arles.

 

Le Château des Arènes fut ainsi laissé en dehors de la nouvelle enceinte, les fossés qui l'entouraient constituant un certain obstacle, et le mur antique, encore à peu près intact jusqu'au Château de la Porte d'Espagne, présentant une protection suffisante.

 

On ne connaît pas le tracé exact des fossés entourant les Arènes, mais on suppose qu'ils devaient réunir leurs eaux dans l'ancien fossé extérieur du mur antique, en un point voisin de la Porte Vieille, non loin de l'endroit où s'éleva, plus tard la Tour Vinatière.

 

Voyons, maintenant, les diverses constatations qui indiquent les étapes successives de la construction de la nouvelle enceinte.

 

Dès 983, le Cartulaire de Notre-Dame désigne sous le nom de « Castellum Morricipio », une tour dont les vestiges laissent supposer qu'elle devait se trouver sur l'emplacement de l'ancienne Porte des Eaux.

 

Vers 1010, une charte fait mention d'un « Mur Neuf » établi dans la partie du fossé du Champ dé Mars voisin du Capitole, à cette date, la nouvelle enceinte était donc en construction.

 

En 1015, un quartier, du côté de la Maison-Carrée, porte le nom de « Quartier du Mur Neuf ».

 

En 1112, il existe un « Castellum » près du moulin de l'Agau, à l'entrée actuelle de la rue du Grand Couvent, où plus tard s'ouvrira la Porte de la Bouquerie.

 

Une charte du 24 Février 1139, nous fait connaître que le Vicomte de Nîmes s'engagea à respecter l'inviolabilité des maisons et des choses qui y sont contenues, qu'elles appartiennent aux habitants de Nîmes ou aux étrangers, sauf le cas oit il s'agirait de faussaires ou de voleurs, dans toute l'étendue comprise à l'intérieur des fossés, cela prouve qu'à cette date l'enceinte devait être établie et déjà entourée de fossés.

 

En 1144, le vicomte Bernard Aton V accorda de nombreux privilèges aux habitants de Nîmes a « que ces habitants, dit la charte, demeurent dans la ville fermée ou au delà des fossés, si par cas la ville venait à se développer. »

 

La même année, il est fait mention d'une cession à des particuliers de deux terrains sur les fossés du Portail de la Bouquerie.

 

A cette date, donc, Nîmes avait non seulement des remparts, des portes et des fossés, mais on prévoyait même l'extension de la ville hors de ses murs.

 

En 1151, on cite une porte à l'entrée de la rue de la Madeleine.

 

« En 1178, écrit M .Mazauric, dans son. Histoire du Château des Arènes, la ville de Nîmes, déjà entourée d'une puissante enceinte de murailles, fut mise à l'abri de toute surprise possible. Le point faible de la défense se trouvait à l'endroit même où le ruisseau de la Fontaine pénétrait dans la ville à travers l'épaisseur des murs sous une double voûte désignée sous le nom de « Las Clotas ». A la demande des quatre consuls de la ville, et du bailli, le vicomte accorda à Bernard Thomas la maison des « Clotes » pour le cens d'une paire de chapons et sous la condition expresse que Bernard Thomas ferait construire des fortifications au-dessus de la maison en question, sur toute la largeur du vallat, de manière que les défenseurs puissent aller d'une rive à l'autre « et inde armata manu resistere ».

 

Ainsi, pendant tout le cours du Xlle siècle, des améliorations sont apportées à la nouvelle enceinte. « Les vicomtes, écrit encore M. Mazauric, s'étaient réservés jusqu'alors la seigneurie et la garde des remparts dont les portes et les tours servaient d'apanage à certaines familles nobles. Mais les bourgeois ne tardèrent pas à réclamer l'entière possession des murailles qu'ils avaient fait édifier à leurs frais ».

 

C'est alors que faisant droit au désir des consuls le comte de Toulouse, Raymond V, publia la charte du 15 Septembre 1194, qui accorda, à perpétuité, a tous les habitants et citoyens de Nîmes la faculté de faire une clôture, des fossés, des murs, des tours, des portes et tous autres ouvrages défensifs qui leur paraîtraient nécessaires, depuis le mur antique de Saint-Thomas jusqu'au fossé du Champ de Mars, tout autour des Arènes.

 

Cette charte à peine accordée, les consuls se préoccupèrent de parfaire l'enceinte fortifiée de la ville, c'est-à-dire de la continuer depuis la Tour Saint-Thomas jusqu'à la Porte Saint-Antoine en englobant les Arènes à l'intérieur des remparts.

 

Mais, avant de voir comment l'enceinte fut parachevée autour des Arènes, revenons un peu arrière et voyons ce qui avait été fait devant ce monument pendant qu'on construisait ailleurs les nouvelles murailles.

 

Disons d'abord que le rempart romain, d'après M. Mazauric, passait tout près des Arènes et n'était pas à plus de quinze mètres de l'extrémité du petit axe du monument.

 

Vers la fin du Xe siècle, la vieille Porte romaine des Arènes, en face du petit axe précité, constitua un petit ouvrage avancé. Dans la suite, une tour carrée fut construite sur sa voûte formant passage d'entrée et une galerie relia cette tour avec la grande galerie du premier étage des Arènes.

 

Vers la fin du Xle siècle, la vieille porte fut remplacée, dans son rôle de passage public, par une autre porte ouverte à quelques dizaines de mètres vers le nord. L'ancienne Porte des Arènes prit alors le nom de « Porte Vieille » et la nouvelle celui de « Porte Neuve ».

 

Quand, après l'octroi de la charte de 1194, les consuls voulurent terminer l'enceinte, la question se posa si le Château des Arènes serait à l'intérieur ou à l'extérieur des remparts, l'avis des consuls qui voulaient le monument à l'intérieur l'emporta et dès lors les travaux furent entrepris.

 

On commença par remplacer l'ancien mur romain depuis la Tour Saint-Thomas jusqu'à la Porte Vieille par un nouveau rempart qui fut établi, non pas sur l'emplacement de l'ancien mur, mais à une vingtaine de mètres au-delà de l'ancienne dougue ou chemin de ronde extérieur. Mais alors la Porte Neuve, ouverte jadis dans l'ancien rempart romain se trouvant en avant du nouveau mur et devenue inutile, fut naturelle ment reportée sur le nouvel alignement, au centre d'une tour carrée dont on voit le dessin dans le plan de Poldo d'Albenas, suivant M. Mazauric.

 

Pour permettre aux eaux du canal ouest des Arènes d'atteindre les nouveaux fossés, on fit une large brèche dans l'ancien mur romain, brèche connue sous le nom de « fracha antiqua » ou « brèche de la canal ». A partir de cette date, la Porte Neuve qui venait d'être déplacée fut désignée sous le nom de « Porte de la Canal » ou encore de « Porte de Saint-Gilles ».

 

Cette première portion de la nouvelle enceinte autour du Château des Arènes terminée, on compléta l'enveloppement du monument en prolongeant le nouveau mur jusqu'au « Mur Neuf » du début qui s'arrêtait là où plus tard devait s'ouvrir la Porte Saint-Antoine.

 

Cette portion de mur qui fut établie entre les Arènes et l'ancien vallat du Champ de Mars est connue, dans certains actes, sous le nom de « barbacane des Arènes ».

 

La branche ouest du fossé des Arènes fut ainsi rejetée en dehors de l'amphithéâtre et, seule, la branche est continua de couler entre la cité et la château des Arènes, jusque vers la fin du XIIIe siècle, époque à laquelle les fossés furent définitivement comblés et des aqueducs construits pour l'écoulement des eaux.

 

La partie de l'enceinte ainsi construite autour des Arènes faisait un saillant à l'intérieur, non loin de l'ancienne Porte Vieille, appelé « angle de la Canal » et préjudiciable à la bonne défense de ce coin des remparts, c'est pour remédier à cet inconvénient qu'en 1358, par crainte des incursions anglaises, on songea à protéger ce point des remparts par une puissante tour octogonale qui, construite peu après, prit le nom de « Tour Vinatière », ainsi appelée parce qu'elle fut construite avec le produit des impôts perçus sur les débits de vin. Cette tour, établie hors des remparts, fut réunie à ceux-ci par deux nouvelles portions de mur, ce qui modifia encore, mais bien légèrement, le tracé de l'enceinte en cet endroit.

 

« A la même époque, a écrit M. Mazauric, la Porte des Arènes ou de la Canal fut munie d'une herse et d'un pont levis ; une échauguette fut élevée sur le mur romain à l'em­placement de la brèche antique : la barbacane des Arènes, ou dernière portion construite de l'enceinte, fut renforcée et surélevée. »

 

Ces derniers travaux, Tour Vinatière, renforcement et surélévation de l'ancienne barbacane des Arènes, marquèrent la fin de la construction de l'enceinte du moyen-âge, qui, commencée dès le début du XIe siècle, terminée vers 1360, devait être complètement démolie sous la Révolution de 1789.

 

Nota : La majeure partie des renseignements de ce chapitre ont été puisés dans l'Histoire du Château des Arènes, de M. Mazauric.

 

Les Murs de l'Enceinte

 

Les murs de l'enceinte du moyen-âge étaient analogues à ceux de l'enceinte romaine, mais moins épais et plus hauts. Ils étaient parementés intérieurement et extérieurement et leur partie centrale formée par un blocage, leur épaisseur variait de 1 mètre à 1 mètre 20 et leur hauteur atteignait 12 mètres.

 

Ils étaient bâtis sur un remblai peu élevé au-dessus du fossé et formant glacis de chaque côté du mur ; couronnés par un chemin de ronde pavé de grandes pierres plates, derrière lequel se tenaient les défenseurs, à l'inverse des remparts romains, ils étaient ininterrompus, c'est-à-dire se continuaient à travers les tours au moyen de portes, on y accédait par des escaliers en pierre accolés aux tours.

 

Le système de défense de l'enceinte fut complété, suivant Germer-Durand, par des appendices en bois et des échauguettes.

 

« Couronnés de merlons et de créneaux, a écrit Germer-Durand, les murs possédaient encore des appendices en charpente surplombant la face extérieure et quelquefois aussi la face intérieure des courtines, tandis que d'un côté on pouvait en surveiller la base contre une attaque nocturne ou un travail de sape, de l'autre, les arbalétriers et archers avaient la faculté de circuler à l'aise, dans les cas, où le chemin de ronde eût été encombré de projectiles ou trop étroit. Ces charpentes protectrices portaient à Nîmes, au moyen-âge, le nom romain de mantelets ou manteaux (mantelleti) ou étages, étagères (scatissae). Dans le nord de la France, elles sont appelées « hourds » ou « gourt », et s'appliquaient aux murs, tours, tourelles et aux échauguettes. La rareté des bois et les dangers d'incendie firent bientôt abandonner ce genre de défense, et le mâchicoulis en pierre remplaça dans beaucoup de pays, surtout dans les pays méridionaux, ces hourds en bois.

Quoi qu'il en soit de son origine très contestable, l'échauguette carrée à mâchicoulis surplombant la partie saillante des tours,les portes et les courtines, très fréquente à Nîmes, s'y appelait (guachile, gachile) gachil ou guette » .

 

Un fossé ou dougue existait à l'extérieur des murs, quelquefois même à l'intérieur, un chemin appelé « Coursière », ménagé sur le bord, du côté de la ville, et pouvant donner passage à 4 ou 5 cavaliers de front permettait de porter un prompt secours aux points menacés.

 

Les Portes de l'Enceinte.

 

Un document du 18 décembre 1270 nous apprend qu'il existait alors sept portes dans la nouvelle enceinte, toutes précédées d'un pont-levis pour la traversée des fossés. En faisant le tour de ville, par le sud, on trouvait :

 

PORTE DE RADES ou PORTE DES CARMES.

 

Cette porte fut ouverte dans une tour ayant appartenu à l'évêque et d'origine romaine, elle se trouvait tout près de l'antique Porte d'Arles, en tirant vers le sud, sur l'emplacement actuel de la Place du Grand Temple.

 

Elle est désignée, en 1346, sous le nom de « Portali dictus Episcopi Nemausi » ; elle fut murée, puis rétablie et connue, en 1399, sous le nom de « Porte des Carmes ».

 

Elle fut murée à nouveau en 1614, en 1619, en 1621 et ouverte enfin à la Paix de 1629.

 

La Porte des Carmes fut, de tout temps, une des principales portes de Nîmes à cause de sa proximité des routes d'Arles, de Beaucaire et d'Avignon qui venaient y aboutir.

 

La Porte des Carmes est désignée quelquefois sous le nom de « Porte de la Croix », à cause d'une foire accordée par le roi aux habitants, en 1566, et qui se tenait du 8 au 23 février, dans la rue de la Porte-de-la-Croix jusqu'à la place Belle-Croix.

 

En 1489, elle fut décorée, comme toutes les portes de la villes des Armes Royales, sculptées sur le mur de la tour du côté extérieur et soutenues par deux anges.

 

La tour dans laquelle fut ouverte cette porte joua un certain rôle, sous le nom de « Tour Froment », lors des troubles de la « Bagarre », en 1790.

 

PORTE DE LA COURONNE.

 

Germer-Durand, dans « Les enceintes successives de Nîmes », désigne cette porte sous les noms de : Porte de Posquières, ou de Vauvert, des Augustins, du Mûrier ou de la Couronne.

 

« Le premier nom, dit-il, est fourni par un acte de 1270, réglant la hauteur et la largeur des tables d'étalage dans un quartier de la ville s'étendant entre le Portail de Posquières (Portale de Poscheriis) et la rue du Chapitre (Carriera Campi Novi Superioris).

 

Le second lui fut donné à cause du couvent des Augustins qui, au XIVe siècle, s'établit non loin de là dans le faubourg, A la même époque, cette porte est appelée aussi « Portale novum de Morerio » ou Porte-Neuve du Mûrier.

Enfin, le nom de la Couronne, employé le plus souvent, vient d'une hôtellerie à l'enseigne de « La Couronne », qui était en dehors de la ville, tout près de cet angle saillant des remparts où se trouvait une tour romaine.

 

Il est dit, en 1356, dans un différend survenu entre Pierre de Caseton, sénéchal, et les consuls, que « cette porte est ouverte depuis peu, dans un état insuffisant pour la défense, et que, au lieu de fermer la Porte des Arènes, on devrait murer celle-ci ».

 

Un règlement des consuls de 1357 prescrit de faire « à la brèche qui est entre la Tour du Marché aux B½ufs et le nouveau Portail de la Couronne, à l'emplacement d'une très ancienne tour, une nouvelle tour saillant d'une canne sur le parement du mur, de la largeur du mur antique, de faire cette tour de douze pans plus élevée que les créneaux du mur, munie de mantelets, avec un chemin de ronde en pierre tout autour. II est aussi prescrit de faire une ouverture au milieu de la hauteur de la tour, avec porte et serrure, ainsi qu'un petit escalier de pierre pour aller de cette porte au chemin de ronde.

 

Voilà donc la Porte de la Couronne et ses deux tours bien clairement désignée. »

 

La Porte de la Couronne fut une des principales portes de la ville. En 1524, le premier consul J. Albenas, fit construire devant cette porte une plateforme pour pouvoir y installer de l'artillerie, laquelle devait servir à la fois à la défense de la ville et au tir des salves d'honneur dues aux personnages importants venant visiter Nîmes. A cette occasion, le consul fit encastrer dans le mur nouvellement construit un grand nombre de débris antiques de toutes sortes, inscriptions, sculp­tures, etc., trouvés un peu partout, parmi lesquels la statue aux quatre jambes qui se voit encore aujourd'hui dans le petit impasse, derrière la Maison d'Arrêt.

 

En 1680, on plaça à la Porte de la Couronne une cloche pour annoncer l'heure de l'ouverture et de la fermeture des portes de la ville et celle du couvre-feu.

 

Une des gravures de l'Histoire de Ménard représente la Porte de la Couronne précédée extérieurement d'un mur demi-circulaire dans lequel s'ouvre une petite porte, près d'une petite tour ronde ; c'est sans doute le mur construit par le consul Albenas cité plus haut.

 

PORTE DES ARÈNES.

 

« Placée à l'angle appelé communément aujourd'hui coin du Palais de justice, écrit Germer-Durand, cette porte a eu successivement et quelquefois simultanément les différents noms de : Porte des Arènes, Porte de Nages, Porte de Pertus, Porte Saint-Thomas, Portalet de la Canal, Portalon des Arènes, Porte Saint-Gilles 995 à 1793 ».

 

Germer-Durand est ici en contradiction avec M. Mazauric qui a écrit dans son Histoire du Château des Arènes

 

« Tout d'abord nous devons relever une erreur commise par plusieurs archéologues nîmois, et notamment Germer-Durand dans sa « Notice sur les enceintes successives de Nîmes ». Il s'agit du rempart romain primitif et de sa direction véritable au sud du monument. Tous les documents que nous avons consultés démontrent que de grandes modifications ont été apportées à cette partie du rempart vers 1195, 1360, 1621, 1661.

 

De là, l'erreur de Germer-Durand, Sans reproduire ici ce que nous avons dit sur la Porte Vieille des Arènes, au chapitre concernant les portes de l'enceinte romaine, et à celui concernant les remparts du moyen-âge, signalons que :

 

La vieille Porte des Arènes, porte antique, fut remplacée vers la fin du XIe siècle, dans son rôle de passage public, par une autre porte ouverte à quelques dizaines de mètres vers le nord, laquelle prit alors le nom de « Porte Neuve » . Après la charte de 1194, quand on termina l'enceinte par un mur entourant les Arènes, on ouvrit, non loin de la Porte Neuve, devenue inutile, une nouvelle porte dans le mur nouvellement construit qui prit le nom de « Porte de la Canal » ou encore celui de « Porte de Saint-Gilles »

 

D'après une des gravures de l'Histoire de Ménard, cette porte n'est qu'une simple ouverture percée dans le mur d'enceinte et il n'y a aucune tour près d'elle, ce qui semble confirmer les assertions de M. Mazauric.

 

PORTE SAINT-ANTOINE.

 

La Porte Saint-Antoine ou encore Porte des Garrigues, dut être ouverte vers la fin du XIVe siècle et en remplacement de la Porte du Champ de Mars, si nous en croyons Germer-Durand.

 

Son nom de « Garrigues » lui vint, sans doute, du nom du quartier dans lequel elle fut créée, quartier qui prit dans la suite le nom de Saint-Antoine.

 

PORTE DU CHAMP DE MARS.

 

« Le Champ de Mars romain, a écrit Germer-Durand, s'étendait des Arènes à la Porte de France et à peu près jusqu'à l'église Saint-Paul actuelle.

 

Ce nom de quartier, toujours conservé, avait été donné au ruisseau qui le limitait dans la direction du nord au sud. Aussi, n'est-il pas étonnant qu'une des portes les plus anciennes l'ait porté jusqu'au XIVe siècle. Construite probablement vers l'année 1144 et antérieurement à la Porte Saint-Antoine, elle dut grâce à la proximité de celle-ci, disparaître au XIVe siècle d'une manière si complète que l'historien Ménard n'a pu en indiquer la véritable position. Tout ce que nous pouvons affirmer, c'est qu'elle se trouvait entre la Porte Saint-Antoine et celle de la Madeleine, à peu près à la hauteur de la rue actuelle de la Monnaie.

 

Germer-Durand semble dire vrai et s'appuie pour formuler son opinion sur ce qu'a écrit Ménard concernant les réparations faites en 1352, 1357, 1363, à la Porte du Champ de Mars.

 

PORTE DE LA MADELEINE.

 

« La plus ancienne porte des remparts du moyen-âge, a écrit Germer-Durand, s'appela tout d'abord la Porte Neuve (1114) et donna son nom à un certain Petrus Rostagnus de Porta-Nova... ; mais, comme elle se trouvait en face de l'église dédiée à Sainte Madeleine, elle en prit vite la dénomination. » .

 

Ici, encore, Germer-Durand est en complet désaccord avec M. Mazauric ainsi que nous l'avons écrit à propos de la Porte des Arènes. « Ce nom, écrit M. Mazauric, Porte Neuve, se trouve seulement deux ou trois fois dans nos archives et devait s'appliquer sans doute à la porte chargée de remplacer la Porte Vieille, qui prit plus tard les noms de Porte des Arènes, Porte de la Canal ou Porte de St-Gilles. Nous n'en aurions point fait mention si nous n'avions trouvé en 1114 le nom de Pierre Rostang de Porte Neuve, comme témoin d'un acte d'inféodation de l'abbaye de St Sauveur».

 

Il est évident que quel qu'ait été son nom primitif, la Porte de la Madeleine est une des plus anciennes de la ville, puisque c'est dans ses environs qu'on mentionne pour la première fois le « Mur Neuf », qui fut l'origine des nouveaux remparts ; il n'y a donc rien d'étonnant qu'une porte ait été ouverte en cet endroit dès le début de la construction de l'enceinte du moyen-âge.

 

On voit encore aujourd'hui, à l'entrée de la rue de la Madeleine, à droite, tout à côté de l'entrée de la pharmacie, et encastrés dans le mur, quatre et non trois, suivant Germer-Durand solides gonds qui ne sont autres que ceux du vantail de droite de l'ancienne Porte de la Madeleine. 

La Porte de la Madeleine fut l'objet de nombreuses réparations, comme du reste toutes les portes de la ville; signalons parmi celles-ci le remplacement vers 1517 du pont-levis de la barbacane par un petit pont en pierres, et que de 1619 à 1626 la porte fut murée. « A quelques pas de la porte, à l'intérieur de la ville, écrit Germer-Durand, on remarque un balcon en fer forgé, du XVIle siècle, avec un écusson central portant découpées dans la tôle deux clefs et cette légende tout autour: « Securitas publica » . La tradition que nous tenons à enregistrer, dit que dans cette maison demeurait le concierge de la Porte de la Madeleine. »

 

PORTE DE LA BOUQUERIE

 

Au début, cette porte se trouvait à l'entrée de la rue actuelle du Grand Couvent, où, dès 1112, on signale un Castellum. Remarquons que c'est là qu'aboutissaient les chemins de la Calmette et des Cévennes.

 

Cette porte fut supprimée en 1688, quand on démolit les remparts du nord de la ville, après la construction de la Citadelle et de l'enceinte supplémentaire englobant tout le quartier des Prêcheurs. Elle fut alors remplacée par une petite porte ouverte près de la Citadelle elle-même, mais à cause des inconvénients de toutes sortes qu'elle présentait à cet endroit, elle fut murée et remplacée, l'année d'après, par une porte beaucoup plus grande, plus près des anciens remparts, face au nouveau Cours établi sur l'emplacement des remparts démolis, et vis à vis de la Porte des Casernes, porte située à l'autre extrémité du nouveau Cours, près de l'ancien Château Royal.

 

Cette porte, indiquée dans une des gravures de l'Histoire de Ménard, se composait d'une grande ouverture cintrée dans le goût de l'époque, terminée par un simple attique. Un pavillon de garde se trouvait à droite en entrant dans la ville.

 

PORTE DU CHEMIN OU DES PRÊCHEURS.

 

Cette porte se trouvait à l'entrée actuelle de la rue des Lombards, elle est connue dès 1114. Elle fut démolie en 1687, après la construction de la Citadelle, tout comme l'ancienne Porte de la Bouquerie. Son nom de < Porte du Chemin » lui vient de son voisinage de l'Agau dont le canal s'appelait « Le Caminus » ; celui de Porte des Prêcheurs, du voisinage du Couvent des Frères Prêcheurs, qui se trouvait en face, hors les murs.

 

De 1583 à 1590, cette porte fut murée, par crainte d'une surprise du côté du faubourg, où les catholiques s'étaient réfugiés en grand nombre.

 

Cette porte est encore connue sous le nom de « Porte des jacobins ».

 

Les Tours de l'Enceinte du Moyen-Age.

 

L'enceinte du moyen-âge utilisa particulièrement tout ce qui restait des anciennes fortifications romaines de la Porte d'Arles à l'Amphithéâtre, mais surtout les antiques et puissantes tours dont les bases, encore solides, furent remaniées pour pouvoir être adaptées aux nouveaux remparts.

 

Sur tout son pourtour, l'enceinte fut pourvue de nombreuses tours de toutes formes, rondes, carrées, octogones, toutes plus élevées que le mur d'enceinte ; leur hauteur atteignait quinze mètres et leur diamètre extérieur était de sept mètres. La plupart d'entre elles étaient couvertes d'un toit, protégeant la terrasse supérieure et les défenseurs.

Un certain nombre de ces tours nous sont connues. En partant de la Porte d'Arles et en faisant le tour des remparts, voici les principales de ces tours.

 

TOUR BISPALINE ou TOUR ÉPISCOPALE.

 

Cette tour, située sur l'emplacement actuel de la Place du Grand Temple, bâtie sans doute à l'endroit où se trouvait une tour romaine, est désignée dans les anciens titres sous le nom de « Tour Episcopale » (Turris Episcopalis 1146 1157) ; elle appartenait à l'évêque de Nîmes et relevait du vicomte de Nîmes. Elle était de forme hexagonale et se confondit avec la Porte des Carmes lorsque la construction d'un château sur l'ancienne porte romaine eût nécessité le déplacement de l'entrée de la Porte d'Arles.

 

Cette tour, connue dès 1146, fut au nombre de celles que le roi Pépin reconnut aux évêques sur toute l'étendue du rempart avoisinant le quartier du Prat ; elle fit partie, en 1170, du fief de la famille de Posquières.

 

TOUR DES CORNUTS ou DU TEMPLE.

 

Cette tour était située sur l'emplacement actuel du boulevard Amiral Courbet, à l'entrée de la rue Poise ou du Collège.

 

Elle tire son nom de la famille « Cornut » qui la tenait en fief, signalée dès 1157, elle appartenait à Guirald Cornut en 1210, elle passa aux mains des Templiers de Nîmes dont elle prit le nom. Au début du XIV, siècle, à la suite du fameux procès des Templiers, elle fut octroyée aux Hospitaliers de St-Jean, à la fin du XVIe, siècle, elle prit le nom de Tour du Collège, à cause de sa proximité avec cet établissement.

 

Le 12 novembre 1564, on grava, sur sa partie saillante, une inscription rappelant le souvenir du passage à Nîmes de Charles IX, et ainsi conçue

 

BENE SIT CARLO NOVO

REGI. POPULOQ NEMAUSI

 

Inscription qui disparut de bonne heure à l'occasion des luttes religieuses.

 

Cette tour était à pans coupés, d'une structure particulière, mieux conservée que les autres tours, ce qui lui valait toute l'attention des Consuls, elle avait quinze mètres de haut et quatre-vingt marches conduisaient à son sommet ; elle était surmontée d'une terrasse avec toiture au-dessus, le tout en charpente et construit en 1357.

 

LE CASTELLUM MORRICIPIUM ou TOUR des BOEUFS.

 

Le Cartulaire de Notre Dame mentionne en 983 un « Castellum » qui devait se trouver sur l'emplacement de l'ancienne Porte des Eaux, à l'entrée de la rue des Greffes actuelle, de ce Castellum il restait une tour hexagonale ainsi que trois arceaux pour le passage des eaux, suivant la « Topographie de Nîmes », par MM. Baumes et Vincens, publiée en 1790, dans un Essai publié en 1849, Pelet dit avoir vu lui-même cette porte vingt ans auparavant, lors des réparations faites au lycée. Elle se composait, dit-il, de deux arcades sans ornements séparées par un piédroit.

 

Dans la suite, le Castellum prit le nom de a Tour des Boeufs », à cause du « Forum Bovum », marché aux boeufs, qui se trouvait tout près, à la Place de la Salamandre, plus tard, elle prit le nom de « Tour de M. de Malmont ».

 

Cette tour est représentée dans l'une des gravures de l'Histoire de Nîmes, de Ménard.

 

TOUR SAINT THOMAS

 

La Tour St-Thomas, d'origine romaine, était située près des murs, dans la rue St-Thomas actuelle, elle est connue dès 1149, époque à laquelle elle servait de chapelle (qui est dans le mur de la ville Ecclesia Sancti-Thome Quae Est In Muro Civitatis)

 

TOUR DU MURIER

 

La Tour du Mûrier était voisine de la précédente et se trouvait sur l'emplacement du Palais de justice actuel ; elle était de forme carrée suivant Rulman.

 

Cette tour ou Maison du Mûrier servait de prison, en 1366, les consuls obtinrent du roi Charles V la démolition de cette geôle, qui interceptait la coursière des remparts, ou chemin de ronde intérieur. Pendant les guerres de religion, la terrasse située au devant de cette tour fut élargie et transformée en plateforme susceptible de recevoir de l'artillerie.

 

TOUR VINATIERE.

 

Ainsi que nous l'avons dit plus haut, cette tour fut construite vers 1360 ; elle tire son nom d'une délibération consulaire du 16 février 1359, portant que les réparations et constructions nouvelles aux remparts seraient faites au moyen d'un impôt sur les vins vendus au détail, c'est-à-dire sur les tavernes.

 

TOURS SAINTE CLAIRE.

 

Entre la Porte St-Antoine et la Porte de la Madeleine, il y avait trois tours, désignées sous le nom de « Tours Ste-Claire » du nom du Couvent des Clarisses situé en face des remparts, sur l'emplacement du Lycée de garçons actuel.

 

Entre la Porte de la Madeleine et la Porte de la Bouquerie, il y avait six tours défendant la courtine de cette partie des remparts.

 

La première de ces tours se trouvait un peu avant d'arriver à la rue de l'Horloge actuelle.

 

La deuxième est connue en 1479 sous le nom de « Tour des Conils » ou « Tour des Lapins », elle se trouvait à hauteur du péristyle de la Maison Carrée.

 

La troisième, d'après Germer-Durand, se trouvait au coin du boulevard de la Comédie, entre la rue Auguste et le boulevard actuel.

 

La quatrième et la cinquième de ces tours, dites « Tours des Clottes » défendaient le canal de l'Agau à son entrée dans la ville. Suivant Germer-Durand, le nom de « Clotte » ou «Crote » vient du mot « Crota », voûte, qui servait à désigner les deux passages voûtés par où passaient les eaux de la Fontaine à leur entrée dans la ville. A l'intérieur de la ville et sur ces voûtes, dont l'entrée était grillée, se trouvait un moulin appelé « Perilhos » ou Perelhos » Pézouilloux, appartenant aux fortifications et à côté des dites tours.

 

« La Tour des Clotes, a écrit M. Mazauric, était construite sur les voûtes, ou crotes, livrant passage aux eaux de la Fontaine du côté ouest de la ville. Une charte de 1178 fait connaître que sur la demande des consuls, le Vicomte donna en censive la Maison des Clotes à Bernard Thomas, avec faculté de l'exhausser et de la fortifier pour l'utilité de la ville ».

 

A l'intersection de la rue Nationale et de la rue du Grand Couvent on voit encore un arceau ayant appartenu ou fait partie des voûtes ci-dessus.

 

La sixième tour, la plus grosse de toutes, se trouvait à l'angle formé par l'enceinte, c'est-à-dire entre l'Agau et l'extrémité de la rue du Grand Couvent.

 

En 1112, on cite un « Castellum », près du Moulin Pézouilloux qui n'est autre, écrit Germer-Durand, que l'ancienne Porte de la Bouquerie, mentionnée « Portalis Bocharia » ou « Portale Bocharia » ou « Portale Camini », dans un acte de 1114, cette porte était en tout semblable à celle de la Madeleine, d'après une ordonnance de 1355.

 

Suivant Poldo d'Albenas, une tour carrée aurait existé à hauteur de la rue Corconne.

 

Une autre tour aurait aussi existé à hauteur de la rue Corcomaire, connue sous le nom de « Turnella », et citée en 1358.

 

Indépendamment des tours signalées ci-dessus, dont l'Histoire nous a conservé le nom ou le souvenir, l'enceinte du moyen-âge était dotée d'autres tours, non identifiées à ce jour.

 

SUITE REMPARTS DE NÎMES

 

> 1 - AVANT-PROPOS.

> 2 - L'ENCEINTE ROMAINE.

> 3 - LES SEPT COLLINES DE NÎMES.

> 4 - NIMES DE LA DECADENCE ROMAINE AU XIe SIÈCLE.

> 5 - LES REMPARTS DU MOYEN-AGE

> 6 - LE CHATEAU ROYAL DE NÎMES.

> 7 - LES FORTIFICATIONS DE ROHAN - 1621 à 1629.

> 8 - LA CITADELLE ET L'ENCEINTE SUPPLEMENTAIRE DE 1687

> 9 - ENCEINTE SUPPLEMENTAIRE DES FAUBOURGS XVe ET XVIe SIÈCLES.

> 10 - LES CASERNES

> 11 - REPARATIONS ARMEMENT - DÉFENSE DES REMPARTS

> 12 - LA DÉMOLITION DES REMPARTS DE NÎMES

 

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