LES ARENES.

Emile ESPÉRANDIEU.

L’amphithéâtre de Nîmes, 1933

 

III

ÉCOULEMENT DES EAUX DE PLUIE

 

En 1906, Félix Mazauric, qui venait d'être nommé Conservateur des musées archéologiques de Nîmes, pénétra dans les souterrains de l'amphithéâtre et, de là, dans les parties accessibles des aqueducs où étaient conduites les eaux pluviales. Il s'assura qu'un premier aqueduc, placé à une distance de sept à huit mètres des pilastres, faisait à l'extérieur le tour du monument et recueillait les eaux provenant des corniches de forte saillie qui entourent l'attique et la façade.

 

 

Le sous-sol de la piste, état des travaux en 1866.

 

Un second aqueduc, placé sous la grande galerie du rez-de-chaussée, aurait reçu les eaux qui tombaient ou étaient apportées par les vents dans cette galerie, les escaliers et les galeries supérieures. A cause de leur faible quantité, cet aqueduc n'aurait pas comporté de canal voûté. D'après Grangent, dont l'architecte Cambacédès a confirmé les remarques en 1910, le sol de cette galerie intérieure serait constitué par un glacis de ciment imperméable, de 0m16 d'épaisseur.

 

Au-dessous, dit de son côté Mazauric, les Romains avaient établi un remblai composé de gros éclats de pierre, qui s'étendait, en profondeur, jusqu'au niveau des fondations. C'est dans ce remblai, offrant beaucoup de vides, qu'arrivaient les eaux pluviales et les écoulements des urinoirs. L'excès des eaux se déversait dans un collecteur par quatre ouvertures rectangulaires mesurant 1m60 de large sur 0m38 de haut et situées à l'entrée et à la sortie de ce canal.

 

On ne peut évidemment pas nier la réalité de cet aqueduc, dont l'existence est attestée par Grangent, Mazauric et Cambacédès ; mais il est remarquable qu'on ne l'ait pas rencontré, en 1932, en faisant des fouilles profondes sous la grande galerie extérieure. De nouvelles recherches pour le remettre au jour seraient nécessaires. Un troisième aqueduc, large de 0m75 à 0m80, traversait les souterrains de la galerie intérieure du rez-de-chaussée 'et se confondait avec eux. Il recevait les eaux qui tombaient sur les gradins et, pour faciliter leur écoulement, ceux-ci avaient une pente uniforme d'arrière en avant dé 0m01 environ. Arrêtées par les murs avec appui qui, vers le bas, limitaient les sections, ces eaux s'échappaient, dans le grand aqueduc, par de petites bouches d'égout et atteignaient les souterrains par des aqueducs secondaires.

 

Il y avait, dans l'épaisseur du marchepied de la plus basse assise, 16 égouts et 24 à travers le marchepied de la cinquième assise, bordant le second mur d'appui.

 

Mais ce n'était sans doute pas tout. Les souterrains ou caveaux que le vieil antiquaire Rulman avait pris pour dés boutiques ou des remises, ont à peu près 5 mètres de long sur 2m50 à 3 mètres de large.

 

Leur plafond, dit Mazauric, est constitué par la voûte rampante qui supporte les six premiers gradins de la cavea inférieure. La hauteur totale de cette voûte dépassait 6 mètres du côté de la galerie extérieure et trois mètres du côté opposé, qui recevait l'écoulement des eaux pluviales.

 

D'autres égouts ont dû servir pour l'écoulement des eaux des gradins des 3e et 4 e sections; mais les dégradations de l'amphithéâtre ne permettent plus de les reconnaître.

 

Mazauric a toutefois remarqué qu'une sorte de « longue cheminée, ouverte du côté de certains caveaux », s'élevait jusqu'au sommet de la voûte rampante, traversait l'épaisseur de la maçonnerie et venait aboutir au-dessus du onzième degré de l'amphithéâtre.

 

Il est probable que cette « cheminée » servait à recueillir les eaux des gradins du haut. Mazauric n'a noté que dix caveaux qui présentent des «cheminées »  ; mais ce nombre n'a pas dû correspondre à la réalité.

 

Enfin, en ce qui concernait les eaux tombant sur l'arène proprement dite, un quatrième aqueduc, auquel on donne improprement le nom d'Euripe, existait parallèlement au bas-mur d'appui. Il était recouvert de dalles et avait une largeur de 1m10. Sa hauteur primitive n'est pas connue..

 

On ne sait pas davantage de quelle façon les eaux de l'arène étaient amenées dans cet aqueduc. L'ingénieur Grangent a constaté, en 1810, des rainures de 0m20 de large sur 0m06 de profondeur au-dessous des dalles de la couverture. Il est bien probable qu'elles ont dû servir pour l’assèchement.

 

Toutes les eaux de l'amphithéâtre étaient finalement reçues par le grand collecteur dont il a déjà été question. Il pénétrait dans le monument sous la grande arcade du nord (porte principale) et s'échappait au sud-est par l'arceau qui porte actuellement le n° 54. Cet aqueduc, en moellons de petit appareil, avait environ 2 mètres de haut sur 0m70 de large.

 

On a cru pendant longtemps que le collecteur, actuellement muré à ses deux extrémités, traversait complètement l'amphithéâtre et servait pour des naumachies. En réalité, il se composait de deux branches, réunies par le quatrième aqueduc, et sur chacune était un orifice carré, fermé par une dalle qui facilitait le nettoyage.

 

D'autres remarques seraient à faire; celles qui précèdent suffisent pour donner une idée du soin méticuleux apporté par les Romains â l'évacuation des eaux de leur édifice. De nos jours, elles atteignent bien le quatrième aqueduc; mais elles ne sortent pas du monument. On a percé cet aqueduc en deux endroits, et le vide en forme de croix qui est au milieu de l'arène les reçoit toutes.

 

-oOo-

 

SUITE - Les Arènes par  Emile Espérandieu, 1933.
> I – Description
> II – Le Velum
> III – Écoulement des eaux de pluies
> IV – La question des naumachies
> V – La date de l’Amphithéâtre
> VI – Les taureaux des arènes
> VII – Nombre de places
> VIII – Les chevaliers des arènes
> IX – Dégagement de l’amphithéâtre
> X – Spectacles antiques
 

 > Contact Webmaster